Mise à jour du 2 mai 2016: BAHAHAHAHAHA!
Dans le cadre de sa campagne Ostie de crosseurs!, la CLAC se penche sur le pouvoir des médias capitalistes. Un pouvoir qui en mène large au Québec, avec au premier chef Québecor Média (Sun Media) et le très creepy Pierre-Karl Péladeau !
Quoi de mieux pour célébrer la rentrée médiatique que de rentrer dans les médias ? Est-ce qu'ils ne nous en doivent pas une pour toujours prendre le parti d’un statu quo capitaliste inacceptable ? Leur sensationnalisme raciste, qui a incité la commission Bouchard-Taylor et qui revient à la charge pour défendre la “Charte des valeurs”, n’a-t-il pas assez duré ? Leur enthousiasme à diffuser les visages de grévistes suspects, inversement proportionnel à leur capacité de se rétracter lorsque les accusations tombaient, n’est-il pas politiquement motivé ? Est-ce qu'ils ne se font pas de plus la piasse en inondant de publicités le peu de contenu qu'ils font ? Est-ce qu'ils sont au service du pouvoir, ou simplement un appendice du pouvoir ?
Lorsqu'on voit la collusion totale entre les faiseurs d'opinions et les gouvernements, la concentration de plus en plus totale des médias en deux blocs monolithiques, et le peu d'alternatives réellement libres, on a raison d'être inquiètEs, fâchéEs, révoltéEs. On est en colère que des chefs industriels comme Pierre Karl Péladeau soient mis à la tête d'Hydro-Québec, vache-à-lait de l'État québécois1. On est frustréEs que partout où l'on regarde, il n'y a que du Star-Académie, ou d'autres vedettes poches conçues de toute pièce par les conglomérats médiatiques à grands coups de subvention d'la SODEQ, alors que ceux dont on aime la musique se font évincer de leurs locaux rue Moreau. On est en tabarnac d'avoir à utiliser facebook pour se battre contre tout ça et de donner des millions par année à la Silicon Valley pour les revenus publicitaires de leur site web. Et on sait toujours pas si ça vaut la peine de leur parler.
Consultez l'édifiant CV de PKP et le parcours impérialiste de son entreprise ultracapitaliste !
Ou lisez ci-dessous :
- Pierre-Karl Péladeau : CV d'un ostie de crosseur
- Concentration : chronique d’une mégacrosse annoncée
- Petite chronologie de la concentration au Canada et au Québec
- La jambonocratie : l'opinion-spectacle au service du discours réactionnaire
- Et les médias sociaux ?
- Média alternatif : militantEs de l'information
- Participer au cirque des médias de masse ?! Quelques arguments pour et contre
1 On voit à la page 16 de leur bilan financier que nos comptes d'Hydro ont subventionné de 2,7 milliards l'État québécois.
Pierre-Karl Péladeau : CV d'un ostie de crosseur
Langues parlées et écrites : Des affaires, du pouvoir, de la propagande, de l'opportunisme.
Carrière d'un crosseur professionnel
Hydro-Québec
Depuis le 15 mai
- Mandat officiel : réviser la politique et la stratégie en matière d’efficacité énergétique d’Hydro-Québec. S'il dirige cette société d'État (qui se comporte comme une entreprise privée) comme il a mené d'une main de fer son empire Québecor, non seulement les syndiquéEs d'Hydro risquent d'en manger une maudite, mais on peut déjà imaginer ce que sera sa stratégie énergétique : exit les énergies « vertes » à moins que ça rapporte gros, welcome les gros projets de privatisation de rivières, augmentation des tarifs d'électricité pour les gens et vente à rabais pour les industries et l'exportation,—mais ça, Hydro le fait déjà !
- Nomination politique par Pauline Marois elle-même, crosseure du mois de janvier 2013. Mais elle se fait rassurante, il n'y aura pas de conflit d'intérêts : « […] si tant est qu’il y avait des dossiers où il pourrait risquer d’être en conflit d’intérêts, évidemment, à ce moment-là, il l’indiquera et se retirera des décisions qui pourraient être susceptibles de le mettre en conflit d’intérêts.1 »
- PKP le multimillionnaire se fait magnanime : il renonce à la prime annuelle de 125 $ généralement versée au président du CA. Non mais, y'é-tu assez fin…
Québecor inc.
Depuis 1997 | Vice-président du CA |
1997-2013 | Président et chef de la direction |
1987-1989 | Conseiller adjoint au président |
1985-1987 | Conseiller au service des fusions et acquisitions |
Québecor Média inc.
Depuis 2013 | Vice-président du CA (et de 2006 à 2008) |
Depuis 2008 | Président du CA de l'agence QMI |
2008-2013 | Président et chef de la direction (et de 2000 à 2004) |
Corporation Sun Media
Depuis 2009 | Président Canoë inc. |
2008-2013 | Président et chef de la direction |
Groupe TVA inc.
Depuis 2013 | Président du CA |
2011-2013 | Vice-président du CA |
Un crosseur et son empire
Bref, vous avez compris le principe... la liste pourrait se poursuivre sur plusieurs pages. Ce qu'il faut retenir ? Notre PKP national est à la tête d'un des plus grands conglomérats des communications, un véritable empire tentaculaire.
Les diverses filiales de Québecor œuvrent tant dans les secteurs des télécommunications (Vidéotron ltée), de l'imprimerie (Imprimerie Québecor inc.), de la distribution (Distribution Select), du livre (Groupe Livre Québecor Média), de la presse écrite (Corporation Sun Média et TVA Publications inc.), de la télé (Groupe TVA, acquis avec l'aide de la Caisse de dépôt et placement), du disque (Groupe Archambault) et du Net (Canoe.ca).
On le voit bien, Québecor contrôle la majeure partie de la production et de la diffusion culturelles au Québec :
- 43 grands quotidiens et plus de 250 hebdomadaires régionaux au Canada (15,1 millions de copies par semaine) ;
- Plus de 70 magazines au Québec (soit près de 50% des ventes totales) ;
- 16 maisons d'édition réunies au sein du groupe Sogides et le plus important éditeur scolaire, Éditions CEC inc. ;
- 10 stations de télé régionales, 4 stations affiliées, la station Sun News et 8 chaînes spécialisées ;
- 15 magasins Archambault et la maison de production de disques Musicor.
Si c'est pas ça la concentration, on se demande bien ce que c'est. Et le résultat n'est pas très édifiant : célébration de la culture en canne (ou star-académisation de la culture), généralisation de l'information spectacle, et hyper-médiatisation de soi-disant faiseurs d'opinion dont l'analyse se réduit au « gros bon sens », aux propos homophobes, racistes et misogynes, tels que Denis Lévesque, Richard Martineau, Éric Duhaime, Benoît Dutrizac, Stéphane Gendron.
En juillet 2010, PKP annonce que Québecor Média retire tous ses journaux du Conseil de presse, sorte de tribunal d'honneur et chien de garde de la presse. C'est un peu lui qui s'assure que les médias respectent un minimum d'imputabilité envers la population. La raison ? PKP est pas content des décisions rendues par le Conseil de presse concernant des plaintes formulées par la population contre les journaux du géant Québecor. Il choisit donc d'aller bouder dans son coin.
Début septembre 2011, PKP s'achète un amphithéâtre. L'entente de plus de 200 pages entre la Ville de Québec et Québecor prévoit que l'entreprise versera à la Ville 33 millions $ pour que son nom ou celui d'une de ses filiales soit donné au futur bâtiment durant 25 ans, et paiera un loyer annuel moyen de 3,15 millions $. Mais advenant un retour de la LNH à Québec (ouin, c'est ça...), ces montant s'élèveront respectivement à 63,5 millions $ et 5 millions $2. Rappelons que cette entente a fini par se conclure grâce à un gros coup de pouce de Pauline Marois. En effet, cette dernière a joué du coude pour que le Parti québécois (PQ) et l'Assemblée nationale votent en faveur du projet de loi 204, qui visait à mettre à l'abri de toute poursuite judiciaire l'entente entre la Ville de Québec et Québecor sur la gestion du futur l'amphithéâtre. Ce projet de loi privé déposé par la député péquiste Agnès Maltais a été dénoncé par plusieurs comme un traitement de faveur, entraînant la démission de plusieurs députés du PQ3.
PKP l'antisyndicaliste et le pro-scabs
Depuis 1994, Québecor a connu pas moins de 14 lock-outs4 ! Le dernier en date, le plus long de l'histoire de la presse écrite au Canada (25 mois), a touché 253 travailleurs et travailleuses du Journal de Montréal. Au cœur du litige : la convergence entre les médias du groupe, les suppressions de postes aux annonces classées et à la comptabilité, et l'allongement de la semaine de travail.
Tout au long de ce conflit, PKP s'est montré impitoyable et a fait preuve d'un antisyndicalisme crasse, allant même jusqu'à empêcher les lock-outéEs de manifester. Deux injonctions, émises en juin et en décembre 2009, leur interdisaient de se trouver sur la propriété de toutes les filiales et divisions de Québecor Media ainsi que sur celles des annonceurs. S'ils voulaient manifester, ils devaient se trouver à au moins 50 mètres de ces établissements et être pas plus de deux personnes. Ça c'est du rapport de force !
MuseléEs par leur crosseur de patron, les journalistes ont décidé de créer leur propre journal, Rue Frontenac, dont le contenu était d'ailleurs de bien meilleure qualité que celui de leur employeur ! Qu'à cela ne tienne, PKP a continué de produire son torchon grâce aux grands talents d'écriture de ses cadres.
Mais c'est avec la création, en plein cœur du conflit, de l'agence de presse QMI (rappelons que Québecor se retire du même coup de la coopérative La Presse canadienne, agence qui fournit articles, reportages audio et photos à plus de 600 journaux du pays) que PKP dévoile son vrai visage : un ostie de pro-scabs. Ses manœuvres se sont d'ailleurs retrouvées devant la commission parlementaire sur la modernisation des dispositions antibriseurs de grève, ce qu'il n'a pas du tout apprécié : « Cette démarche est d'autant plus étonnante que cette commission s'immisce dans un conflit privé sous la pression d'une des parties en cause [...], un syndicat qui, depuis le début, a démontré un refus systématique de composer avec la nouvelle réalité des médias en s'enfermant dans la pure tradition des partisans du statu quo5. »
Un crosseur et sa fortune
PKP et son frère Érik occupent la 15e position du palmarès des Québécois les plus fortunés et la 85e des 100 plus grandes fortunes canadiennes, avec des avoirs de 534 millions $6.
Formation
1988-2001 | Membre du Barreau du Québec |
1987 | License en droit , Université de Montréal |
1985 | Baccalauréat en philosophie, UQAM |
Fait cocasse
Dans sa jeunesse, a été membre du Parti communiste ouvrier du Canada7. Comme quoi... |
1 Jessica Nadeau, «Pierre Karl Péladeau présidera le conseil d'Hydro Québec», Le Devoir, 17 avril 2013, www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/375896/pierre-karl-pela...
2 Vincent Larouche, «Amphithéâtre: l'entente entre Québecor et Québec est signée», La Presse, 2 septembre 2011, www.lapresse.ca/actualites/national/201109/02/01-4431264-amphitheatre-le...ébecor-et-quebec-est-signee.php
3 «Nouvel amphithéâtre : le principe du projet de loi 204 adopté», http://www.radio-canada.ca/regions/Quebec/2011/09/20/005-rentre-debats-p...
4 http://www.newswire.ca/fr/story/361753/Québecor-12-lock-out-en-13-ans À cette liste il faut ceux du Réveil (2009) et du Journal de Montréal (2009-20011).
5 «Le conflit au Journal de Montréal devant les élus», http://www.radio-canada.ca/nouvelles/Politique/2011/02/01/001-commission...
6 «Qui sont les Québécois les plus riches?», www.millionnairezine.com/dossiers-speciaux/qui-sont-les-quebecois-les-pl...
7 http://fr.wikipedia.org/wiki/Parti_communiste_ouvrier_(Canada)
Concentration : chronique d’une mégacrosse annoncée
Si la santé d'une société démocratique se mesure à la qualité et à la diversité de l'information qui y circule, on peut aujourd'hui remercier Internet de tenir la nôtre en vie, parce que les sources traditionnelles d'information grand public sont de plus en plus rares, débiles et anémiques.
Le phénomène de la concentration des médias n’a rien de nouveau, mais pendant la plus grande partie du xxe siècle, il ne s’agissait ni d’un enjeu de société majeur, ni nécessairement d'une menace concrète aux valeurs libérales démocratiques. On assiste par contre depuis 40 ans à une multiplication des transactions et à une diminution marquée du nombre de groupes contrôlant tant la production que la diffusion de l’information et de la culture de masse.
Au Québec, c’est lors de l’acquisition du journal La Presse par le sinistre Paul Desmarais (Gesca) en 1967 que l’inquiétude a commencé à s’accentuer, puisque à ce moment-là, le même big shot possédait déjà les quotidiens Le Nouvelliste et La Tribune. En 1973, devant la possibilité que le groupe Gesca se porte acquéreur du journal Le Soleil, à Québec, une commission parlementaire, réunie à la demande du premier ministre Robert Bourassa, a amené Desmarais à renoncer à son projet. Ce n’était cependant que partie remise pour Gesca qui, en 2000, a profité du climat politique plus favorable pour racheter tous les journaux du groupe Unimédia (Le Soleil, Le Droit, Le Quotidien), ce qui lui a conféré plus de 50 % des parts du tirage des quotidiens francophones au Québec.
On note par ailleurs que de 1970 à 1980, la proportion de journaux indépendants sur le marché est passée de 50,8 % à 10 % et était de 3 % (Le Devoir et une poignée d'autres imprimés) en 2002. Un des derniers hebdomadaires indépendants du Québec, Le Canada français (fondé en 1860), a été racheté par Transcontinental en 2011, rétrécissant encore davantage la part de marché occupé par les indépendants. La même année, Québecor avait déjà absorbé toute une série d'hebdomadaires. La guerre des conglomérats est donc loin d'être finie, comme en témoigne par ailleurs la récente chicane épique entre Bell Média et Québecor.
Derrière l'inquiétude ostentatoire, le je-m'en-câlisme des gouvernements
En fait, la concentration de la presse fait partie du processus plus large de la concentration capitaliste, soit l'accaparement total des moyens de production. Elle est en outre rendue possible par le désengagement complice de l'État et l’absence de législation un tant soit peu responsable. Malgré la rhétorique et les vœux pieux des dirigeants, leur inaction à cet égard prouve que la « libre » concentration des capitaux est plus sacrée pour eux que la « libre » circulation d’une information diversifiée et de qualité.
À preuve, depuis 1969, au moins 13 commissions ou groupes de travail, à l'échelle provinciale ou fédérale, ont cherché des solutions publiques aux effets de la concentration sur la diversité et l'indépendance de la presse. C'est du gouvernement fédéral que sont venues les trois interventions qui ont marqué le plus significativement la réflexion sur la question.
Le comité Davey, en 1970, a proposé :
- la création d'un conseil de surveillance de la propriété de la presse qui pourrait aller jusqu'à refuser que des transactions soient faites ;
- la création d'une caisse de prêts pour le développement des publications pour soutenir des initiatives en matière d'édition.
La commission Bryce, en 1978, juge dans son rapport que « la concentration des organes d'information aux mains d'un petit nombre de propriétaires comporte des dangers latents ». Dans une recommandation, elle propose que le CRTC ait le mandat d'empêcher la propriété croisée des journaux et des médias électroniques.
La Commission royale sur les quotidiens, présidée par Tom Kent (commission Kent) en 1981, est encore aujourd'hui une référence obligée en la matière. L'une des conclusions de son rapport est que « contrôle d'entreprises de presse par des conglomérats représente la forme la plus dangereuse de concentration, car leurs objectifs de rentabilité ne sont pas nécessairement compatibles avec les critères d'une information complète et de qualité ». Par conséquent, l’accent est mis sur les moyens possibles pour contrer l’homogénéisation du contenu rédactionnel. Ainsi, la Commission fait les recommandations suivantes:
- promulguer une loi sur les journaux au Canada ;
- interdire toute nouvelle concentration importante de la propriété et du contrôle des quotidiens ;
- limiter la propriété par un même groupe à 5 quotidiens et à 5 % du tirage national ;
- interdire qu’une entreprise possède plusieurs journaux régionaux en même temps qu’un quotidien à portée nationale ;
- garantir par contrat l’autonomie des rédacteurs en chef.
Cette commission ne semble pas avoir donné de suite, puisque la concentration s'est poursuivie, et même amplifiée dans les années 1980 et 1990.
Petite chronologie de la concentration au Canada et au Québec
1992
Hollinger achète la part de 22,6 % de Southam que détient Torstar Corp.
1996
Hollinger acquiert le contrôle de Southam en achetant la participation de 18,7 % de Power Corp. Avec cette transaction, qui porte sa part de Southam à 41 %, Hollinger contrôle 59 quotidiens au pays, dont 20 appartiennent à Southam.
L'arrivée de Conrad Black à la tête de Southam provoque des démissions.
Ted Rogers vend le bloc de contrôle des actions de Toronto Sun Publishing au groupe de cadres de la chaîne. La compagnie est renommée Sun Media Corp.
Sun Media Corp cède le Financial Post à Southam.
Le 27 octobre 1996, le nouveau quotidien de Southam, le National Post, est lancé.
1998
En décembre, Québecor acquiert la chaîne Sun Media et supprime du coup 180 emplois.
Avec cette acquisition, Québecor contrôle maintenant 25,4 % du tirage moyen des quotidiens du pays, deuxième derrière Hollinger-Southam qui possède maintenant 42 % du marché.
1999
Southam devient une compagnie privée, Hollinger ayant racheté les parts des actionnaires minoritaires.
Hollinger créé une nouvelle compagnie, Hollinger Canadian Newspapers, Limited Partnership. Celle-ci regroupe la plupart des journaux des plus petits marchés canadiens où Hollinger est présent. Les quotidiens des marchés de Vancouver, Edmonton, Calgary, Ottawa et Montréal, de même que le National Post et le Halifax Daily News, notamment, demeurent propriété de Southam.
2000 : l'année des fusions
Thomson met en vente tous ses journaux sauf le Globe and Mail et cinq autres quotidiens.
Hollinger met en vente environ 350 de ses journaux nord-américains, soit la plupart des hebdomadaires (et plusieurs petits quotidiens du Hollinger Canadian Newspapers, Limited Partnership).
CanWest achète la plupart des journaux canadiens de Hollinger. La transaction s’élève à 3,2 milliards $, faisant de CanWest le plus important éditeur de journaux au Canada.
Québecor annonce l'acquisition de Vidéotron pour 5,4 milliards $, ce qui donne naissance au premier géant québécois multimédia, Québecor Media. La Caisse de dépôt et placement du Québec, en voulant éviter à tout prix que Vidéotron soit vendue à Rogers Communications, appuie Péladeau pour la création de Québecor Média. Selon le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), la Caisse a englouti plus de 2,5 milliards $ dans le projet en devenant actionnaire à 45,3 % de la compagnie Québecor-Vidéotron. Rogers a empoché le montant de pénalité de 241 millions $ que devait lui verser Vidéotron si le projet de fusion entre les deux groupes n'était pas concrétisé.
Gesca, la filiale médias de Power Corporation, achète UniMédia, propriété de Hollinger. L'entente comprend, entre autres, les quotidiens, Le Soleil de Québec, Le Droit d'Ottawa et Le Quotidien de Chicoutimi. Le deuxième géant médiatique québécois est consolidé.
2001
Hollinger annonce qu'elle vend à CanWest sa part de 50 % dans le The National Post Company, qui publie le quotidien du même nom. La transaction est finalisée en mars 2002.
2002
Avec l'achat de Radiomédia, dont les stations AM CKAC et CHRC, par le groupe TVA, Québecor ajoute la radio privée à ses positions dominantes dans les quotidiens, la télévision privée, les magazines grand public et à sa position très forte dans les hebdos régionaux.
2007
Québecor achète Osprey Media et consolide encore sa position au Canada anglais (20 quotidiens, 34 journaux non quotidiens et plusieurs autres).
2011
Québecor lance la chaîne anglophone d'info en continue Sun News, affectueusement baptisée la « Fox News du Nord ».
En rachetant 15 nouvelles publications hebdomadaires, Sun Media (Québecor) contrôle désormais 71 journaux régionaux au Québec.
Transcontinental (TC Media), un autre géant, se porte acquéreur de 11 autres hebdos québécois et s'assure ainsi le contrôle de ce marché, en compétition avec Québecor.
2012
Au nom de la « démocratie », Pierre-Karl Péladeau implore le CRTC d'empêcher l'acquisition d'Astral Media par Bell Media, qu'il juge relever d'un « réflexe monopolistique »… À ce sujet, le nouveau PDG de Québecor, Robert Dépatie, a récemment déclaré lors d'une commission du CRTC : « C'est un monstre qu'on va créer. C'est une machine dominante qu'on va créer. [...] Ça ne devrait pas exister une entreprise avec autant de contrôle ».
La jambonocratie : l'opinion-spectacle au service du discours réactionnaire
Un avis, c'est comme un trou de cul: tout le monde en a un.
Dicton populaire
En 2013, mais c'est ainsi depuis déjà longtemps, la nouvelle n'est plus que de la nouvelle. C'est de la saucisse à hot-dog. Les impératifs capitalistes du spectacle ont gagné les sphères de l'information officielle, du journalisme sérieux, et nous vivons désormais à l'ère de l'information-spectacle. Pour gagner la course à l'audimat, gage de revenus publicitaires renouvelés, tous les coups bas sont permis. Les fabricants d'information, à l'instar des fabricants de saucisses, n'ont aucun scrupule à mousser coûte que coûte l'attrait de leur produit, quitte à en compromettre la qualité. Si les services publics ne sont pas étrangers à ce phénomène de fuite vers le bas, c'est sans doute chez les diffuseurs et entreprises de presse privés que la compétition sauvage pour l'attention (et les dollars) du public s'avère la plus farouche.
Dans ce paradigme comptable, un phénomène connexe a pris de plus en plus de place ces dernières années: l'opinion-spectacle. La fine frontière entre information, divertissement et opinion est de plus en plus perméable, et c'est invariablement le citoyen-consommateur qui paie les frais d'une société de plus en plus mal informée, de moins en moins démocratique et constamment exposée au dangereux tir groupé des innombrables faiseurs d'opinion qui polluent l'actualité (lire manipulateurs, puisque ce mécanisme n'est jamais politiquement innocent), des éditocrates les plus influents (André Pratte, Alain Dubuc, etc.) aux bouffons-de-poubelle les plus insignifiants (Stéphane Gendron, Dominic Maurais, Carl Monette, etc.).
Entre ces deux pôles se trouve toute une gamme de chiens-qui-jappent, aux aboiements plus ou moins forts et plus ou moins portants, mais pratiquement tous situés à droite du centre sur l'échiquier politique. Ce conservatisme persistant dans l'opinion formatée n'est pas le fruit du hasard. Il reflète une culture et un statu quo sociopolitique dominés par les intérêts capitalistes. Des intérêts, est-il utile de le rappeler, foncièrement antidémocratiques. L'opinion-spectacle, sous le couvert du divertissement, mais au même titre que l'éditorial sérieux, sert un sinistre programme politique. Elle balise et rétrécit, par le choix conscient des intervenants, des thèmes et des paramètres de discussions, le champs des possibles démocratiques. Bientôt, il n'y a plus de « normale » que l'opinion exprimée et martelée par cet étroit faisceau d'idéation politique. La gauche, pour ne rien dire de l'extrême-gauche, est reléguée à la marge dans un élan de considération symbolique servant précisément à projeter une frauduleuse image de« justesse et d'équilibre » (pensons au rôle objectif de gauchistes de service, tolérés dans l'espace médiatique, comme l'érudit Jean Barbe ou le divertissant Prof Lauzon).
Si bien que les valeurs extrême-centristes si chères au Québec depuis les années soixante-dix sont dans les faits, malgré tous les démentis, dévoyées quotidiennement par un barrage incessant d'opinions conservatrices et réactionnaires, flirtant même parfois avec le fascisme pur et simple (voir Maurais, Monette et Cie à Radio X).
Par souci de salubrité publique, la CLAC vous propose un bref tour d'horizon de l'actuelle jambonocratie québécoise.
L'écurie Québecor Média (Sun Media)
C'est au sein de la puissante machine Journal de Montréal / Journal de Québec / TVA-LCN / Canoë (de loin les organes d'information et de désinformation les plus lus et les plus regardés au Québec) que sévit la plus spectaculaire clique de patenteux d'opinion de ce côté-ci de l'étasunienne Fox News. Pendant populiste de l'éditocratie sérieuse qui règne à La Presse et de la bien-pensance libérale qui subsiste au Devoir, Québecor arrose incessamment la populace d'opinion pré-mâchée et semi-digérée avec son cocktail toxique de chroniques, de blogues et d'émissions « d'affaires publiques » tirant sur la polémique-spectacle (Martineau, Denis Lévesque, etc.). En cherchant, on trouve bien dans ce fouillis quelques opinioneux gauchisants (dont le congédiement de Jean Barbe a marqué une réduction dramatique), mais la tendance idéologique est résolument braquée à tribord. La confusion de l'information, du spectacle et de l'opinion atteint des sommets inégalés sous l'Empire PKP.
Richard Martineau : champion toutes catégories des idiotorialistes
Le parcours atypique de ce bouffon se passe presque de présentation. Véritable prototype de la gau-gauche bobo plateaunienne du nowhere des années 1990, il se porte à la défense de la veuve et de l'orphelin dans les pages de l'hebdomadaire culturel Voir ; il y pourfend la droite et ses dérives, vilipende les hypocrites et le star-système et mène même une croisade enflammée contre... la concentration et la convergence des médias. Il taquine les puissants jusqu'à ce que le lock-out du Journal de Québec lui donne l'occasion de virer sa veste de bord. Il devient alors un gros crisse de scab bien poisseux, et ce revirement marque le début de sa longue et pathétique conversion à tout ce qu'il conchiait publiquement auparavant : bourgeois, réactionnaire, hypocrite, et vedette à deux cennes avec sa tronche de cauchemar en couverture du 7 jours. La belle vie ! On pourrait en dire long sur la carrière invraisemblable de ce pourri, mais nous vous invitons plutôt à lire cet instructif survol biographique :
http://www.mauvaiseherbe.ca/2012/06/18/deux-ou-trois-choses-que-je-sais-...
Citation classique :
« Vu sur une terrasse à Outremont: 5 étudiants avec carré rouge, mangeant, buvant de la sangria et parlant au cellulaire. La belle vie! »
Éric Duhaime, Joanne Marcotte et la connexion Réseau Liberté-Québec
Imaginons un bref instant que des militants et militantes de la CLAC, de l'Union communiste libertaire ou du Parti communiste révolutionnaire tiennent une chronique dans le quotidien à plus fort tirage du pays, en plus de tenir des blogues fort fréquentés et de multiplier les apparitions à la télé et à la radio. On pourrait à juste titre prétendre que leur influence sur l'opinion publique serait importante, voire déterminante. Certains iraient jusqu'à prétendre que ces gens, qui sont parvenus à occuper de telles positions d'influence, « contrôlent » le Québec. Pourtant, dans le vrai monde, ce n'est pas à des anars et à des anticapitalistes enragés que le Journal de Montréal offre sa tribune, mais à une collection de prétendus libertariens, ces gens de droite qui prônent un laissez-faire absolu en matière économique et une réduction drastique de l'État... sauf quand celui-ci sert les sacro-saintes « libertés » capitalistes. Cela n'empêche pas des individus comme Éric Duhaime et Joanne Marcotte de répéter ad nauseam, du haut de leur tribune, que la société québécoise est dominé et « contrôlée » par la gauche et les syndicats. Bref, c'est le monde à l'envers. Dernier exemple à l'appui : Duhaime a récemment pleurniché que Radio-Canada manquait d'impartialité en offrant à Gabriel Nadeau-Dubois un gig de chroniqueur régulier à l'émission de Marie-France Bazzo ; il omettait de signaler du même coup que sa collègue chroniqueuse au Journal, la réac Lise Ravary, s'est vue offrir ce même rôle à la même émission matinale.
La réputation de Duhaime n'est plus à faire : il est le fer de lance patenté de la droite revendicatrice au Québec. La véhémence de sa rhétorique anti-gauche n'a d'égale que son omniprésence dans la sphère médiatique. Son passé est jonché d'associations nébuleuses, notamment avec l'Institut économique de Montréal et la National Democratic Institute aux États-Unis, un think tank aux ramifications suspectes1. En plus de ses chroniques au JdM, carnets et fréquentes interventions à la télé, à la radio, sur Facebook et sur Twitter, il anime une émission régulière à Radio X Montréal.
Sa collègue et co-fondatrice du Réseau Liberté-Québec, la grimaçante Joanne Marcotte, sévit également au Journal de Montréal ou elle matraque une rhétorique libertarienne pas tant anti-sociale qu'asociale... la logique en banqueroute du tout-au-marché. (http://jomarcotte.wordpress.com/)
Citation :
« La vérité, c’est que ce que nous observons est essentiellement relié à la culture islamique. La vérité, c’est que même s’il ne s’agit que d’une minorité radicale et extrémiste, c’est tout de même une minorité radicale et extrémiste islamique2. »
Lise Ravary
Cette ancienne ré(d)ac-cheffe de Châtelaine est « réputée pour son franc-parler. C'est sans doute pourquoi on l’entend à la radio et on la voit à la télévision », nous indique d'emblée sa bio au Huff Post Québec. Ben coudonc... si c'est tout ce que ça prend. En 2008, cette « féministe » au franc-parler propose l'abolition pure et simple du Conseil du statut de la femme.
Citations :
« Pour se donner bonne conscience, ces défenseurs de l'indéfendable brandissent, tel des trophées, les chiures d'intellectuels de gauche comme le linguiste Noam Chomsky... » - JdM 2013« Avons-nous encore besoin d'un Conseil du statut de la femme pour défendre nos intérêts? […] Les femmes n'ont pas encore atteint la pleine égalité dans notre so-ciété, mais le Conseil n'a plus la crédibilité pour intervenir de manière efficace dans les dossiers de l'heure. […] Il faut remplacer ce Conseil par quelque chose de plus moderne. De plus inclusif. Pourquoi pas un Conseil du statut de la personne ? » - Châtelaine 2008
« À chaque fois que la FFQ prend le micro au nom de nous toutes, je suis convaincue, archiconvaincue que la majorité des Québécoises ne s'identifient pas au discours néo-marxiste de la Fédération. » - Huff Post 2012
Mathieu Bock-Côté : sociologue nationaliste conservateur
Chargé de cours à l'UQÀM, Bock-Côté milite pour le PQ avant de se rendre compte que ce qui était vraiment problématique dans le nationalisme, c'était l'aspect identitaire. Il se concentrera dès lors à dénoncer le multiculturalisme et le pluralisme. Il tournicote avec les gens de la revue Égards, qui désirent qu'on parle d'« un apartheid arabe, non israélien », qui flirtent avec le mouvement pro-vie et parlent même de la « certitude que la liberté et la propriété sont étroitement liées, qu’avec l’abolition de la propriété privée, on se retrouverait dans l’antre du Léviathan ». Ces opinions ne s'améliorent guère, alors on lui confie un blog au Journal de Montréal, où il pollue depuis des pages.
Citation :
« L’apocalypse, pour reprendre un terme biblique, n’est pas le stade final d’un monde finissant dans la décomposition, d’un monde définitivement détruit. C’est le surgissement, sans qu’on s’y attende, de forces « infernales » qui viennent détruire l’œuvre de la civilisation et les vies humaines et qui peuvent s’éclipser aussi rapidement qu’elles sont apparues. »
(Plus de citations à http://fuckyeahmbc.tumblr.com/)
Sophie Durocher
La très chiante compagne du susnommé Martineau ne donne pas sa place quand il s'agit de dire de la bouette. La Cour supérieure du Québec a récemment statué que cette « personnalité », qui est surtout connue pour aimer avoir sa face dans les médias, avait terni la réputation de Gesca par sa « négligence, son imprudence et son manque de rigueur journalistique3 ». Le pathétique chum de Durocher s'était lui aussi fait taper sur les doigts par le Conseil de Presse du Québec en 2012 pour information inexacte, propos discriminatoires et préjugés4, pour avoir rapporté tout croche la position de la CLASSE sur la violence. Faut croire que dire n'importe quoi est une fière tradition dans le foyer Martineau-Durocher.
Citations :
« Georges Laraque est noir. Grégory Charles aussi. Normand Brathwaite est noir. Michaëlle Jean aussi. Et chaque fois que des humoristes les ont imités ils ont mis du maquillage noir. Véronique Cloutier est blonde. Julie Snyder est brune. Laurence Jalbert est rousse. Et chaque fois qu’une humoriste les a imitées, elles se sont mises une perruque blonde, brune ou rousse. Fin du débat. »« Les Québécoises sont belles mais pas assez sexy. »
Jean-Jacques Samson
Ce « journaliste » sévit dans les pages du JdM et du JdQ. Il a tout récemment publié une chronique, dans le plus pur esprit masculiniste, où il déplore le glissement inexorable de la société vers le « matriarcat » totalitaire, ou quelque chose du genre. « Le jour n’est peut-être pas si loin où la création d’un ministère de la Condition masculine s’imposera au Québec », trucule-t-il. Et ça passe comme du beurre dans les journaux à Péladeau, par ailleurs régulièrement servis en la matière par les commentaires rétrogrades d'une Denise Bombardier.
Citation :
« [L'homme] se chargera de la plupart des tâches ménagères. Il gérera le frigo et le garde-manger. Prisonnier de cet esclavage, son statut périclitera, tout comme sa confiance en lui. Sa production de testostérone chutera. (…) Gêné, il voudra peut-être même porter le voile. »
Les «ex» qui bloguent
N'oublions pas les nombreux politiciens has been, comme les ex-péquistes Jacques Brassard et Joseph Facal5, l'insignifiant Gilles Duceppe, le beige Jean-Martin Aussant et l'inénarrable Mario Dumont, qui n'ont aucun scrupule à trangresser les limites du bon goût en continuant d'écoeurer le peuple en leur nouvelle qualité de «écialistes» des affaires publiques...
L'écurie Gesca /Power Corp
C'est bien connu, la grosse Presse à Desmarais est à la solde du Parti libéral du Québec et, plus généralement, du clan fédéraliste de la bourgeoisie canadienne-française. La caste des pontifes de Gesca, grassement payés pour leur flagornerie engagée, comprend André Pratte, Alain Dubuc, Lysianne Gagnon, Vincent Marissal, Mario Roy, Yves Boisvert et quelques autres larbins taillés dans le même bois et qui fredonnent tous plus ou moins la même rengaine statuquotiste et affairiste. À gauche, mais surtout au centre, les boss de La Presse préservent un simulacre d'équilibre en gardant dans leur équipe éditoriale une poignée de cœurs saignants et de bien-pensants utiles. Mais qui doute encore que les faiseurs d'opinion sur le pay roll de Power Corp servent sagement la main qui les nourrit6 ?
V pour vidanges
Immédiatement après avoir racheté le réseau TQS en faillite, en 2008, les frères Rémillard (qui ont littéralement fait fortune dans les ordures7) se sont empressés d'en éliminer le service des nouvelles, depuis longtemps déficitaire. Après le départ de Mario Dumont vers Québecor, qui avait mis la table en matière de populisme de droite avec la quotidienne Dumont 360, c'est l'imbuvable zouf Stéphane Gendron (déjà congédié de TQS en 2006 !) qui est venu boucher le trou à V. De 2011 à 2013, Gendron a co-animé Face-à-face: le débat, une dose quotidienne de propagande par la médiocrité : des débats « d'actualité » entre une brochette de démagogues de droite (voir ci-dessus), quelques pions de gauche et Gendron lui-même, qui n'agit pas tant en avocat du diable qu'en girouette hystérique. Là encore, il ne s'agit pas tant de dégager des idées originales ou stimulantes que de faire un show bruyant en ayant l'air de savoir de quoi on parle. Quoi qu'il en soit, le choix des questions et la façon de les poser trahit un programme politique extrêmement clair (voir les exemples ci-dessous). Cette émission a apparemment été retirée des ondes... on ose à peine imaginer ce que V réserve au monde après Dumont et Gendron. Voici un échantillon des « questions » les plus édifiantes de l'émission Face-à-face8 :
- Doit-on ralentir l’immigration ? Devrait-on interdire l’immigration non-francophone ? Immigration illégale au Canada : tolérance zéro ? Marier un étranger : rêve ou cauchemar ? Immigrants au chômage : devrait-on les déporter ? Doit-on forcer les régions à accueillir un quota d’immigrants ? Devrait-on permettre l’embauche d’employés étrangers à bas prix ? Abaisser le nombre d'immigrants au Québec : pour ou contre ? Accommodements religieux en milieu de travail : êtes-vous choqué ? Devrait-on interdire le port du voile dans les lieux publics ?
- Vous sentez-vous menacé par l’anglais dans votre communauté ? Doit-on forcer les anglophones à parler français ?
- Doit-on retirer les droits particuliers aux Amérindiens ? Doit-on retirer le droit aux Autochtones de s’autogérer ?
- Les syndicats : une nuisance pour l’économie ? Les syndicats empêchent-ils le Québec d’avancer ? Les syndicats sont-ils trop puissants ? Conditions de travail : les syndicats trop gourmands ? Conditions de travail: avons-nous encore besoin des syndicats ?
- Les riches ont-ils tous les torts ? Qu’est-ce qu’on a contre les riches ? Pis, votre boss, vous l'aimez ? Faire de l’argent au Québec, est-ce encore mal vu ? Le Québec doit-il offrir des rabais d’impôts aux ultra-riches ? Un Québec sans corruption, est-ce possible ? Les jeunes Québécois sont-ils paresseux ?
- Devrait-on limiter l’assistance sociale à 3 ans ? Compressions à l’aide sociale : bonne stratégie pour pousser les prestataires au travail ? Doit-on forcer les assistés sociaux à combler les emplois disponibles ? Doit-on forcer les assistés sociaux aptes au travail à réintégrer le marché de l’emploi ? Doit-on obliger les chômeurs et les assistés sociaux à travailler sur les fermes ? Réforme de l'assurance-emploi : la bonne solution pour mettre fin aux abus ? Le gouvernement a-t-il raison de s’acharner sur les chômeurs ? Devrait-on instaurer une ligne de dénonciation du travail au noir ? Les travailleurs québécois sont-ils rendus trop fragiles ? Les jeunes sur le marché du travail : des bébés gâtés ? Les fonctionnaires sont-ils trop gâtés ?
- Doit-on couper dans les services sociaux ? Coupes en santé : est-ce si pire que ça ? Compressions dans les Commissions scolaires : quels services doit-on couper ? Doit-on arrêter de subventionner le transport en commun ? Le peuple Québécois vit-il au-dessus de ses moyens ? Burn-out : bar ouvert pour tous ? Êtes-vous tanné de payer pour la retraite des autres ? Doit-on forcer les enfants à payer pour les vieux jours de leurs parents ?
- Les étudiants devraient-ils retourner en classe ? Les étudiants sont-ils victimes des policiers ? Manifestations étudiantes : l’image du Québec et de Montréal est-elle affectée ? Appuieriez-vous votre enfant s’il manifestait ? Conflit étudiant : quel parti va ramener les étudiants en classe ? Comment va se régler la crise avec les étudiants ? On en discute avec l'ex-ministre Jacques Dupuis en studio. Boycott étudiant : les tribunaux ont-ils un rôle à jouer ? Gabriel Nadeau-Dubois mérite-t-il la prison ? Gratuité scolaire : le service militaire une solution ? Doit-on éliminer les cours d’arts et les remplacer par des cours utiles ? Devrait-on couper les programmes d’étude sans avenir ?
- Est-ce qu’il devrait y avoir uniquement des femmes naturelles en publicité ? Les femmes méritent-elles le même salaire que les hommes ? Est-ce moralement acceptable d'être enceinte après 40 ans ? Pensions alimentaires : en donnez-vous trop ? Doit-on restreindre l’accès à l’avortement ? Y a-t-il trop de femmes dans nos écoles québécoises ? En couple, les femmes ont-elles trop d'attentes ? Miss Univers : les concours de beauté sont-ils mauvais pour l'image de la femme ? Ligne ouverte : les garagistes arnaquent-ils réellement les femmes ?
- Fréquenteriez-vous une personne handicapée ? Imposer des extras aux personnes en surpoids : raisonnable ou pas ? Maltraitance des personnes âgées : est-ce qu’on exagère ? Doit-on donner de l’argent aux itinérants ? Itinérance : sommes-nous trop tolérants ? Jeunes itinérants : une nouvelle taxe pour les sortir de la rue ? Un criminel emménage à côté de chez vous : déménagez-vous ?
- Profilage par les policiers : politique « tolérance zéro » ? Croyez-vous que les policiers font du profilage ? Ce matin, nous voulons démystifier les principaux mythes véhiculés à l'endroit du travail des policiers. On reçoit un porte-parole du SPVM en studio ! Devrait-on interdire les insultes envers les policiers ? On reçoit Yves Francoeur, président de la Fraternité des policiers de Montréal, en studio. Nos prisonniers sont-ils choyés ? Le Québec est-il prêt à rouvrir le débat sur la peine de mort ? Système de justice : trop de droits pour nos accusés ? Quotas de contraventions : une solution pour renflouer les coffres des municipalités ? Devrait-on installer des caméras de surveillance dans tous les lieux publics ?
- Les personnalités publiques doivent-elles afficher leur homosexualité ? Peut-on « guérir » l’homosexualité ?
- Croyez-vous que l’action humaine réchauffe la planète ? En avez-vous assez de payer plus cher pour être "vert" ?
- Un Noël sans cadeau: oseriez-vous?
- Regrettez-vous d’avoir voté NPD?
- Devrait-on fermer les petits villages du Québec ?
- Devrait-on légaliser la vente d’organes?
Citations de Stéphane Gendron :
« Les tabarnaks d’étudiants. Les criss, ça va finir dans le sang un moment donné. Ils ne cessent de provoquer… Câlisse on veut aller travailler bande d’esties de puants sales. La bastonnade, c’est pour quand? » Sur Facebook, mais quand même.« Hum Hum Manifestation des étudiants nus ce soir: viens de voir les photos. Bofff. Beaucoup de bourrelets et de chaire molle. Assez dégueu.... merci! Y a pas de quoi convaincre un chat. Ils devraient lever leur derrière et aller au gym.»
«L'autre jour, chu reculé sur un [chat], il venait de venir au monde. Chu sûr qu'y a rien senti. Le pick-up est passé dessus comme si de rien était. J'étais assez content, yes! Un de moins. »
Et la désormais classique vidéo « BeurkVomi » :
Radios poubelle
Que dire de nouveau sur ce nocif épiphénomène de l'opinion-spectacle en provenance directe de la « Région de la Capitale nationale » ?
Une citation suffira :
« Développement du Plan Nord ? On se garde une partie… où ce qu’on se fait une espèce de… Un peu comme à Fermont, un mur. Pis on les enferme là-dedans… Toutes les itinérants, du monde dans rue, tu les prends, tu pognes une pelle, ramènes ça en arrière, monte-moi ça dans le Nord, installe-moi ça là. Tu as la paix. Tu en as pu. T’entends pu rien parler. Merci bonsoir. (…) On fait du ménage là! Je m’en fous où ce qu’on met les déchets nous autres après. (…) Tu les castres avant. »
- Carl Monette, Radio, janvier 2012.
Pour de nombreuses autres perles du genre, visitez : http://www.sortonslespoubelles.com.
Aux USA et ailleurs au Canada
Il va sans dire que le phénomène de l'opinon-spectacle réactionnaire dépasse les frontières. Aux États-Unis, c'est sans nul doute la chaîne Fox News qui mène le bal, avec une galerie de personnages tous plus blancs et rétrogrades les uns que les autres, tels que Bill O'Reilly. Parmi les autres grosses pointures de la démagogie droitiste allignée grosso modo sur le mouvement bidon Tea Party, mentionnons Rush Limbaugh, Ann Coulter et le larmoyant Glen Beck.
Au Canada, la palme revient au commentateur ultra-conservateur Ezra Levant, qui sévit sur les ondes de Sun News, la Fox News du nord. C'est lui qui a récemment suggéré que des éco-anarchistes québécois pouvaient être responsables de la tragédie ferroviaire de Lac Mégantic... innocente hypothèse que le champion Duhaime s'est empressé de re-twitter en couinant...
1 http://voir.ca/marc-andre-cyr/2012/08/14/le-caractere-fetiche-d%E2%80%99...
2 http://jomarcotte.wordpress.com/2013/05/27/le-droit-de-juger/#more-6416
3 http://conseildepresse.qc.ca/actualites/nouvelles/sophie-durocher-neglig...
4 http://conseildepresse.qc.ca/decisions/d2012-04-090
5 Voir le dossier des ostie de crosseurs de janvier 2013, http://www.clac-montreal.net/crosseurs_PQ#PQ_3
6 Voir la fiche signalétique du Clan Desmarais : http://www.clac-montreal.net/crosseurs_juin_2013_conference-de-montreal#_2
7 Julien et Maxime Rémillard, voir http://fr.wikipedia.org/wiki/Maxime_R%C3%A9millard, et pour la connection avec les déchets : http://www.lapresse.ca/debats/chroniques/yves-boisvert/200911/18/01-9226...
8 Toutes ces questions, rigoureusement authentiques et tirées directement de la page Facebook de l'émission ( https://www.facebook.com/v.faceaface ) on été débattues à l'émission ou soumises à un sondage ou à une ligne ouverte.
Et les médias sociaux ?
Lorsqu'on pense à l'univers médiatique, on oublie souvent la grande diversification des médias qui s'est produite dans les 20 dernières années. De grands changements sont survenus, permettant à de plus en plus de gens de participer à un certain contrôle sur les médias. En effet, le web 2.0, les blogs et même Facebook facilitent la diffusion d'information, tant entre les individus que dans la société en général. Toutefois, l'argent s'est mis de la partie il y a longtemps, et les profits liés à internet font que le réseau est devenu un champ de bataille pour le contrôle de l'information.
Nouvelles et anciennes formes
Les médias sont principalement financés par la publicité, ce qui fait en sorte qu'ils doivent nécessairement promouvoir le mode de vie encouragé par les gens qui désirent acheter de la publicité. Dans le système capitaliste, les gens qui ont des stocks à écouler sont évidemment les mêmes qui possèdent les moyens de production. Les médias tendent donc à suivre l'opinion des grands de l'industrie et du commerce. Qui plus est, avec la concentration des médias, les entreprises médiatiques deviennent si grandes que leurs dirigeants se retrouvent dans les mêmes banquets 5 étoiles que les grands capitalistes de ce monde.
L'ère de gloire des médias de masse a commencé à s'effriter à partir des années 1980 et 1990, lorsque les gens se ruaient vers tout ce qui semblait alternatif : jeux vidéos, blogues, internet, partage de fichier pairs à pairs, publications underground, salles de clavardage, etc. C'est ainsi que les médias non participatifs comme la télé, la radio et la presse ont commencé à recruter des individus désirant reconquérir l'espace médiatique... pour le meilleur et pour le pire.
Résultat : le jeu vidéo et l'internet deviennent de plus en plus populaires et gagnent du terrain sur la télévision, la presse écrite et l'industrie cinématographique. Désormais, 50 % de la population joue à des jeux vidéos. On estime qu'en 2019, les gens regarderont plus de vidéos sur internet que la télévision. Toutefois, il faut comprendre que cette tendance s'accompagne de changements technologiques majeurs et qu'internet devient la méthode de distribution de la vaste majorité des contenus. On se rappellera que la télévision, et avant elle la radio, ont été créées à l'initiative des États1, contrairement à internet, qui est né comme un réseau d'échange de fichiers entre universités2, qui sont certes dans les mains des États, mais possèdent une autonomie propre.
Un des points tournants dans la commercialisation d'internet est la mise à mort de Napster par l'industrie du disque. Napster était simplement un système permettant de partager ses fichiers musicaux avec toutes les personnes branchées sur le réseau, sans aucune limite ou restriction, et qui regroupait plus de 100 millions d'utilisateurs-trices à son pic. De nombreuses fuites de chansons tirées d'albums plusieurs mois avant leur sortie ont été à l'origine des poursuites judiciaires de l'industrie du disque. Cette bataille a donné le ton aux années 2000 : comment contrôler un réseau ayant d'aussi grandes possibilités en terme de partage ? Et comment le rentabiliser ? En 2002, Napster devient un service payant qui commence à verser de forts subsides aux compagnies de disques.
Web 2.0
En 1996, hotmail.com insère un lien dans le bas de chacun des courriels envoyés : « Obtenez une boîte de courriel gratuite sur hotmail.com », ce qui donne naissance au marketing viral, basé sur la capacité de rediffusion des utili-sateurs-trices3. Au tournant des années 2000, des activistes mettent en place les bases du réseau Indymedia, avec des logiciels comme Scoop et Drupal, pour permettre des sites de publication ouverte, facilitant l'accès aux médias pour tous et toutes. Une autre brèche est ouverte : les utilisateurs-trices des sites peuvent améliorer, produire ou réviser le contenu. En 2001, Wikipedia est lancé, et on assiste ensuite à la multiplication des forums de discussion, ainsi qu'aux nouvelles formes de publicité liées à ces médias.
Toutefois, les revenus publicitaires sur internet sont encore marginaux comparativement à la presse écrite4. Ainsi, internet reste un marché risqué, une mode qui risque de passer, et avec l'explosion de la bulle .com vers 2001, on cesse d'y investir aussi massivement pendant quelques années. Mais les avancées technologiques sur le réseau continuent : diffusion simplifiée de vidéos, amélioration des interfaces utilisateurs-trices, agrégation de systèmes de paiement en ligne. Les entreprises de vente en ligne se multiplient et la distribution de « biens digitaux » se simplifie par l'apparition de services comme iTunes Store en 2003, qui vend des chansons pour iTunes5 au coût de 99 cents. Pour plusieurs, c'est le moment où nous sommes passés d'un réseau d'échange à un réseau de vente. On peut clairement imaginer la suite : on passe d'un internet du partage à un internet de vente. Et en 2004, l'industrie du disque américaine (RIAA) intente des poursuites contre les gens qui partagent des fichiers sur internet.
Les États se rendent rapidement compte qu'internet leur a quelque peu glissé des mains, et réalisent leur erreur. C'est ainsi qu'on est passé d'un réseau très peu régulé au début des années 1990, à un réseau complètement surveillé en 2005, pour finir avec un système de surveillance centralisé en 2013.
Les médias sociaux
Dès les débuts d'internet, des compagnies comprennent l'intérêt d'utiliser les capacité créatrices des utilisateurs-trices du réseau pour mousser leur popularité. Il y a eu Geocities, un service d'hébergement qui ajoutait simplement des bannières publicitaires aux pages mises en ligne par ses utilisateurs-trices ; Livejournal, qui facilitait la création de contenu par les utilisateurs-trices ; et Myspace, qui ajoutait simplement la fonction de partage de chanson. L'idée est la même : prendre en charge la diffusion des contenus et en tirer un profit, par le biais de la publicité. Lorsque Youtube et Facebook arrivent, ils ne font que continuer sur la même lancée.
Le datamining, l'agrégation et la rétention
Au début d'internet, les publicités sont bien rares, mais avec l'augmentation de la consommation en ligne, il y a de plus en plus de revenus à faire avec les internautes. Les moteurs de recherche font monter les enchères pour des mots clé dès 1998. Déjà on commence les publicités ciblées, et bientôt les systèmes de recommandation automatisés sont mis en branle. Pour ce faire, toutes les actions des utilisateurs-trices sur des sites web sont enregistrées, triées, mises en relation et utilisées pour améliorer l'expérience du site web. Par exemple, en 2006 Netflix lance un concours visant à améliorer son système de recommandation de films : il met à la disposition des participantEs une banque de données de 100 millions d'évaluations de 18 000 films par 480 000 utilisateurs-trices (anonymes), recueillies entre 1998 et 2005, et offre 1 million $ à qui pourra améliorer l'algorithme alors en fonction6 pour faire des recommandations de films à ses usagèrEs.
Désormais, la majorité du contenu publicitaire est servi par Google qui, à partir de l'historique des résultats de recherche sur le même ordinateur, déduit les contenus susceptibles d'intéresser les utilisateurs-trices. Ainsi, les publicitaires peuvent faire des publicités ciblées en fonction de l'auditoire, ce qui les rend d'autant plus intéressantes.
Transformer la consommation, d'un acte essentiellement anonyme en un acte catalogué, facilite les publicités ciblées, qui encouragent la consommation compulsive. Pire, c'est une excellente façon de connaître, et même de prévoir les habitudes de consommation des gens. Par exemple, la chaîne de pharmacie américaine Target possède des algorithmes qui visent à déterminer si une personne est ou sera enceinte sous peu, et envoie ensuite par courrier des circulaires aux futurs parents7. De nombreux sites d'achat en ligne changent aussi les prix en fonctions des profils de consommation8. Avant que ces sites affichent un prix, ils déterminent quel est notre profil d'acheteur ou d'acheteuse, et si, par exemple, on achète régulièrement des livres de philosophie, nos prix pour ces livres seront révisés à la hausse. Pire, dans de nombreux pays les renseignements concernant la santé d'une personne sont particulièrement prisés par les compagnies d'assurances9, puisqu'ils permettent d'obtenir une estimation des risques de maladies.
La plupart des sites web conservent les informations qu'ils collectent, mais puisqu'il s'agit d'entités privées, il est tout à leur avantage de ne pas partager les techniques utilisées s'ils veulent en tirer un revenu. On sait que de nombreux sites possèdent des politiques de rétention d'information du genre « toute information entrée sur notre site devient notre propriété », comme sur Facebook, et on ne sait jamais ce qui est échangé et, surtout, avec qui.
Les systèmes de recommandationVous êtes-vous déjà demandé pourquoi tant de sites vous proposent des items qui sont « fréquemment achetés avec celui que vous achetez » ? Lorsqu'on achète un objet dispendieux, on le magasine pour obtenir une fonctionnalité spécifique, fréquemment facilitée par des achats supplémentaires. Ainsi, on se fait vendre des batteries quand on achète une télécommande, des gants avec une pelle, etc. Ces recommandations étant enregistrées elles aussi, elles se raffinent plus on les utilise. |
Les comportements payants
On le voit, la capacité de traquer une masse d'utili sateurs-trices10 permet d'extraire un profit maximal de leur consommation. Depuis le début des années 2000, on assiste à des créations d'entreprises qui ont pour seul but d'attirer le maximum d'utilisateurs-trices, et qui sont ensuite revendues pour des sommes allant jusqu'à 20 dollars par utilisateurs-trices. Car si l'information ne peut être analysée à des fins profitables, elle peut être rachetée par une firme qui a besoin de visibilité. Des informations encore plus détaillées peuvent êtres extraites par le biais des jeux vidéos. L'exemple le plus connu est America's Army, qui se présente essentiellement comme un jeu de recrutement, en plus de donner une formation de base.
Finalement, les connaissances de ces firmes sur nos comportements s'affinent de plus en plus au fur et à mesure que l'informatique se rapproche de nous. Des ordinateurs sur nos bureaux, devenus des laptops sur nos divans, puis maintenant des téléphones intelligents et des tablettes que l'on transporte tout simplement partout. Avec les récentes révélations de Snowden, on a une idée des programmes de surveillance en place11, mais on sait que le temps est nécessaire pour parvenir à une large masse de donnée qui permette des systèmes de détection encore plus forts.
Une nouvelle criminalité ?
Avec la montée de l'utilisation des médias sociaux, une panoplie de mesures sont mises en place pour détecter les crimes informatiques. Essentiellement, on crée un état d'exception, en disant que l'internet change la nature des crimes et qu'il faut mettre en place des législations plus adaptées. Toutefois, la majorité des crimes liés à internet sont déjà inclus dans lois actuelles. Le but est de permettre une plus grande intrusion dans la vie privée, et pour faire d'une pierre deux coups, d'augmenter les accusations et les peines liées à ces crimes. Par exemple, aux États-Unis, la peine maximale pour le piratage de contenu en ligne est de 250 000 $12, alors que dans certains États la peine maximale pour un vol de moins de 500 $ est de 1 250 $13. Même si peu de gens considèrent ces crimes comme reliés entre eux14 puisqu'il n'y a pas de victimes directes du téléchargement « illégal » , on le réprime encore plus fortement.
Toutefois, les cas de piratage en ligne ne sont que la pointe de l'iceberg. Essentiellement, puisque la nature du crime est simplement de partager des données, n'importe qui, y compris les « propriétaires » du contenu partagé, peut simplement télécharger les contenus pour prouver la culpabilité de la personne qui le par tage. Dans cette lutte aux crimes informatiques, des moyens d'espionnage parfaits ont pu être développés et les États ont déjà bien compris l'importance de ces informations. Dans les procès politiques, on voit clairement que les éléments présentés comme preuve sont un assortiment soigneusement sélectionné d'informations, et non pas l'ensemble de la « preuve » recueillie, puisque la plupart des informations sont obtenues illégalement ou mettraient la puce à l'oreille des autres militantEs. Par exemple, aux États-Unis, on a vu qu'il est possible pour les gouvernements d'avoir accès aux conversations téléphoniques et aux messages textes15, mais ce n'est que récemment qu'on a commencé à utiliser les messages textes archivés dans les téléphones d'arrêtéEs pour porter des accusations. Au Québec, de nombreuses personnes se sont fait arrêter pendant la dernière grève étudiante pour des contenus postés sur Facebook.
En conclusion
Ce qui était jadis un lieu de partage et d'entraide est lentement en train de devenir un système de surveillance centralisé. Il faut se rappeler qu'à chaque fois que les capitalistes nous rendent la vie plus facile avec une application, un service, ou quoi que ce soit, c'est dans le but de faire un plus grand profit, de mieux nous contrôler, ou trop souvent, les deux à la fois !
Média alternatif : militantEs de l'information
Dans nos belles démocraties il est convenu que le quatrième pouvoir, les médias, vient contre-balancer le pouvoir exécutif, judiciaire et législatif, dont l'État a le monopole. Les médias seraient en quelque sorte le pouvoir dédié aux masses, celui qui les informerait sur les questions politiques. Bref, un pouvoir qui agirait en tant que chien de garde contre l'État et ses dérives. Ainsi, la population pourrait s'organiser et passer à l'action. Que nenni ! Depuis longtemps leur force critique a été dissipée. Pire, les médias corporatifs ne sont devenus que des outils de propagande du capital, critiquant l'État et ses mesures quand ça fait l'affaire des Big Shots capitalistes. L'information est donc non seulement une question d'argent mais aussi une arme contre cette même population qu'elle devait protéger.
Ce n'est pas un hasard si les mouvements sociaux se sont dotés de journaux alternatifs pour relayer leur pensée au reste de la population. Cette tradition ancienne a pris racine au XIXe siècle et elle se poursuit encore de nos jours. Nombreux sont les collectifs qui s’engagent dans l'éducation populaire grâce à des journaux créés hors de la logique capitaliste. C'est à la fois un retour de la force critique et une réelle démocratisation des médias.
La dernière grève étudiante a d'ailleurs été un véritable laboratoire dédié à l'information. D'un côté, l'information a été mutilée pour mieux dissimuler la réalité de notre société, et, de l'autre, de nombreux collectifs et individus ont émergé afin de rétablir les faits. Nous avons assisté à l'émancipation de la pensée. Peu à peu on a vu l'importance que prenaient 99%media, CUTV, UniversiTV, et bien d'autres sites de nouvelles, pour les contestataires du système.
L'une des principales raisons qui expliquent l'importance des médias alternatifs au sein des mouvements sociaux et de contestation est que nombre de crimes commis par la police resteraient inconnus aux yeux du public sans eux, car les médias corporatifs n'ont certainement pas le même intérêt à montrer la violence du système.
99%média avec son film Dérives1 analyse avec justesse les crimes sociaux qui ont été commis - en partie - par la presse au cours de cette grève. Ce documentaire agit comme contre-poids à la désinformation qui a été pratiquée pendant plus de 7 mois. Par exemple, on y voit une vidéo personne se faire heurter par un véhicule de police lors de l'émeute de Victoriaville le 4 mai 2012. Les médias de masse, quant à eux, n'ont diffusé que le segment précédant l'arrivée de la voiture2, qui montrait la violence des manifestant-e-s et non celle de la police. Il a fallu attendre presque un an pour qu'un média de masse, Radio-Canada, se décide enfin à faire un reportage sur les faits et à questionner avec sérieux le discours de la SQ sur les événements de Victoriaville3. Trop tard. Surtout considérant l'ensemble des efforts réalisés par de nombreux collectifs et individus. On n'a qu'à penser à cette scène captée par CUTV où l'on voit que la SQ empêche l'arrivée d'une ambulance4. Cette séquence n'a jamais été reprise dans aucun média corporatif. Ce qui les intéresse c'est, au mieux, de vendre les révoltes populaires comme un spectacle, ou, au pire, de manipuler les images pour donner l'impression que ceux et celles qui résistent contre l'oppression ne sont que des animaux et qu'il est donc normal que l'État utilise sa force pour maintenir l'ordre. Cette logique diffère bien de celle des médias alternatifs, autant sur le fond que sur la forme. À titre d'exemple, UniversiTV5 n'utilise jamais de voix pour commenter l'action, et ce, afin d'éviter de formater le sens chez les auditeurs et auditrices, leur laissant la liberté de se faire leur propre opinion. De son côté, Moïse Marcoux-Chabot6 analyse les événements et les différents discours de la police, allant jusqu'à démontrer que la police a bel et bien manipulé les faits. Les médias corporatifs, eux, ont ignoré cette réalité. Ils ont le plus souvent repris le discours officiel de la police. Le Journal de Montréal a poussé l'injure jusqu'à titrer sa une : « La SQ malmenée. Plus violent que jamais ». À ce stade, ce n'est même plus gros, c'est carrément gras.
Mais le champ d'action des médias alternatifs ne se limite pas à la dénonciation des abus policiers, ils touchent aussi à une large variété de sujets. Le Centre des médias alternatifs du Québec (CMAQ), qui était la branche québécoise d'Indymedia, publiait quotidiennement des textes portant sur de nombreux enjeux sociaux, mais, faute de volontaires, le site n'est plus mis à jour. D'autres collectifs préfèrent traiter de thématiques plus précises, comme le groupe Québec FachoWatch qui assure une veille antifasciste afin de prévenir la population des dangers de nombreux groupes d'extrême-droite, ou encore le groupe G.A.P.P.A., qui s'est donné pour mission d'analyser les médias de masses sous l'angle de la propagande. Ces médias citoyens ne font pas que documenter ou analyser des événements, ils aident aussi les individus à participer à cet effort de documentation. Par exemple, CoopMédia Montréal a récemment publié une interview7 qui explique comment filmer les manifestations.
Le modèle des médias alternatifs offre aux journalistes une liberté d'action qu'ils et elles ne pourraient retrouver dans les médias traditionnels. Ici, nul besoin de publicités pour se financer, ni de s'assurer que le contenu n'entre pas en conflit avec les intérêts des propriétaires. Le modèle financier est davantage transparent et fait appel aux contributions volontaires de la population. Son plus grand avantage est que l'information est gratuite, elle n'est plus réduite au rang de marchandise. Enfin, les médias alternatifs sont un gage de diversité : une multitude de formats et de styles sont utilisés pour aborder la réalité. Le Couac adopte un ton satirique pour commenter l'actualité, nous rappelant qu'il vaut parfois mieux en rire qu'en pleurer. Submedia.tv offre de nombreux documentaires gratuits abordant des enjeux sociaux d'un point de vue anarchiste ou anticapitaliste.
Certes, certains de ces médias sont structurés autour d'une ligne de pensée idéologique, mais ils s'en revendiquent au lieu de se prétendre objectifs comme les médias corporatifs, qui sont pourtant soumis à des lignes éditoriales. Parfois, ces médias alternatifs sont l'initiative d'organisations politiques. Le Journal des alternatives, par exemple, est une publication d’Alternatives, une ONG progressiste se réclamant des principes de l'altermondialisme. On peut aussi citer Le Partisan, l'organe de diffusion du Parti communiste révolutionnaire(PCR), ou encore l'Ultimatum, le journal de l'ASSÉ. Il s'agit pour ces groupes de combattre la domination de la pensée unique, promue par l’élite politique et économique et relayée par les médias de masse.
Les médias alternatifs deviennent alors également une forme de militantisme. Caméra ou stylo à la main, ces journalistes critiquent le quotidien. L'édifice sur lequel se construit le capitalisme repose sur des mythes. Pour les déconstruire, la démocratisation des médias est un formidable outil. Il s'agit de faire preuve d'intelligence, de cesser de croire le flot de clichés vomis à raison de 24 images/seconde par les médias corporatifs, d'aiguiser son esprit critique et de partager ses recherches. C'est par une multitude d'actions qu'il est possible de sortir de la pensée unique.
1 http://fr.wikipedia.org/wiki/Quatri%C3%A8me_pouvoir
2 http://www.99media.org/2013/02/derives_13.html
3 http://www.youtube.com/watch?v=VcWHy8S4MmU
4 http://www.radio-canada.ca/emissions/enquete/2012-2013/Reportage.asp?idD...
5 http://www.youtube.com/watch?v=iOhg0sV8MMU
6 http://www.universitv.tv/archives/1547
7 http://moisemarcouxchabot.com/categorie/archives/balles-de-plastique/
8 http://montreal.mediacoop.ca/fr/audio/discussion-sur-lart-de-capter-des-...
Participer au cirque des médias de masse ?! Quelques arguments pour et contre
Le débat sur la collaboration des mouvements sociaux avec les médias de masse est une question récurrente qui n'a jamais été réglée complètement. En général, les groupes et les associations font fi des désagréments et des désavantages pour avoir accès à une certaine couverture médiatique.
Dans le milieu anticapitaliste, les débats sur cette question ont toujours été animés, en premier lieu en raison du rôle fondamental que jouent les médias de masse dans ce système oppressif qu'est le capitalisme. Déjà lors de la « première CLAC », créée pour organiser la mobilisation contre le Sommet des Amériques en 2001, ce débat avait suscité de longues discussions et il avait été décidé finalement de privilégier les médias alternatifs, avant les médias publics et corporatistes.
Quelques raisons de le faire malgré tout !
À la CLAC-Montréal actuelle, la question se pose depuis les préparatifs pour l'organisation des manifestations contre le G20 de Toronto en 2010. Étant donné les différentes visions exprimées dans le milieu, il était exclu de soit boycotter les médias en tout temps, soit de jouer leur jeu sans mettre de conditions ou sans être plus sélectif et créatif sur les façons de « dealer » avec eux. Pour alimenter le débat actuel et pour la suite des choses, voici quelques arguments favorables à une certaine forme de collaboration avec les médias publics et capitalistes, ainsi que quelques suggestions de moyens à mettre en place :
- Les médias de masse nous permettent de rejoindre une grande partie de la population que nous ne pouvons pas rejoindre par nous-mêmes (par exemple, les gens qui habitent dans des régions éloignées) et ainsi de sortir de notre zone de confort en ne s’adressant pas qu’à notre milieu.
- Malgré un traitement souvent douteux, le fait que les médias de masse diffusent nos communiqués et des extraits d'entrevues ou de discours matérialise dans la sphère publique la présence des idées et des groupes anticapitalistes.
- Le fait que les médias parlent de nous peut inciter des gens à se tourner vers nos outils d'éducation populaire (par exemple, notre site internet).
- Notre présence dans les médias de masse nous permet de répondre aux mensonges et aux préjugés véhiculés par les politiciens, les relationnistes du patronat et de la police...et par les journalistes eux-mêmes !
- Il est possible de « hiérarchiser » les médias corporatistes, par exemple en décidant de ne pas travailler avec certains ou de ne solliciter que certainEs journalistes plus compétentEs ou « sympathiques » à notre cause.
- Il est possible d'avoir différentes stratégies selon les événements qu'on organise (par exemple, n'envoyer qu'un communiqué sans faire d'entrevues).
- Il est possible de se servir des médias pour dénoncer leur rôle et leur attitude (par exemple, dans un communiqué ou lors d’entrevues en direct.
- Il est souhaitable de faire une rotation des porte-paroles pour contourner le « star-system » qui afflige le monde médiatique…et aussi le monde militant.
- Collaborer avec les médias ne nous empêche pas de créer nos propres moyens de diffusion !
Quelques raisons de passer son tour !
S'il est normal qu'une organisation souhaite diffuser son message dans la sphère publique, il est toutefois important de se questionner sur la viabilité des moyens utilisés. En tant qu'organisation anticapitaliste, il est important de rester ferme sur nos principes et de refuser toute forme de collaboration avec des médias corporatistes ou capitalistes. Voici une série d'arguments visant à démontrer les dangers d'agir autrement.
- C'est inscrire le discours anticapitaliste dans une structure capitaliste, risquant ainsi de l'exposer à une critique qui s’appuierait sur la contradiction inhérente à l’usage d'un tel moyen de diffusion.
- Les médias corporatistes ont depuis longtemps pris soin de caricaturer l'image de l'anticapitaliste : c'est unE ennemiE, un danger public, celui ou celle qui ne cherche qu'à détruire la société et à imposer son idéal égoïste par la force. Collaborer avec les médias de masse revient à tendre la perche pour se faire battre.
- Les médias de masse ont souvent usé de ruses pour contrefaire le discours anticapitaliste : citation tronquée ou sortie de son contexte, quand il ne s'agit pas de pure invention ou de manipulation grossière. Et une participation accrue ne fera qu'augmenter ce risque : accorder une entrevue, c'est donner du matériel qui sera monté afin d'en garder seulement la partie que les médias corporatistes trouveront intéressante.
- Même en prenant grand soin de choisir un journal ou unE journaliste reconnuE pour son « objectivité », il y a de très fortes chances que le message soit réduit à une série de clichés pour le rendre compréhensible pour le « grand » public (avec toute la condescendance que cela implique).
- Afin de « passer » dans les médias de masse, le discours anticapitaliste est souvent dilué : on critique le néolibéralisme plutôt que le capitalisme lui-même, ou alors on condamne certaines actions anticapitalistes pour tenter de plaire au plus de gens possible.
- L'absence totale de moyen de communication de masse peut devenir un incitatif pour la création de réels outils médiatiques alternatifs. En s'investissant dans la création de contenu dans les médias de masse, par des conférences de presse ou des communiqués, on s'investit moins dans la création d'alternatives médiatiques.
- Y participer peut créer une pression dans nos groupes (vouloir à tout prix respecter le deadline des médias, par exemple, plutôt que d’avancer à notre rythme).
- Diffuser dans l'espace public nos idées est toujours possible par diverses actions de visibilité, en augmentant l'effort de terrain, par exemple en prenant la peine de parler à la population directement.
- Les médias de masse fonctionnent par individualisation. Ce n'est jamais une idée ou un mouvement qui est capté, mais un corps offert en spectacle. Les porte-paroles sont réduits à l'état de stars. Ce phénomène comporte de nombreux risques : le mouvement n'est jugé que sur la performance des porte-paroles et non sur les actions des groupes, on tend inconsciemment à les faire correspondre à un certain idéal occidental (couple blanc hétérosexuel) pour que le message rejoigne plus facilement la majorité de la population, tandis que les médias corporatistes tendent à généraliser les propos émis par les porte-paroles à l'ensemble du mouvement, ne tenant ainsi pas compte de la multiplicité des points de vue qui opèrent à l'intérieur de celui-ci. Tout ceci a pour effet que les porte-paroles deviennent la cible d'envie ou d'admiration, ce qui crée des dynamiques malsaines dans toute organisation le moindrement démocratique. La toxicité des médias de masse infecte à la fois mouvements, organismes et individus, pour les transformer en marchandise qui sera vendue sur la une.
- Y participer a pour effet de légitimer des shows médiatiques, et confirme l’impression que ces médias offrent une diversité d’idées, même « radicales ».