Je peux vous résumer le 1er mai anticapitaliste de 2014 selon les médias de Montréal : "Pourquoi, pourquoi y'a pas d'itinéraire ?" Comme si c'était ce qu'il y avait de plus important, comme si le jour du 1er mai était reconnu mondialement comme la journée sans itinéraire. C'est clair, on est anticapitaliste : on s'oppose à cette classe politicailleuse qui décide de se partager tout le gâteau entre eux et qui nous laisse seulement les déchets. Alors, quand on nous dit qu'il faut protester en suivant un itinéraire approuvé par le gouvernement, s'habiller de la manière approuvée par le gouvernement, scander les slogans approuvés par le gouvernement, faire les actions approuvées par le gouvernement ... La protestation approuvée par le gouvernement, ce n'est plus de la protestation. Une perturbation approuvée par les banquiers, ça ne perturbe rien. Une manifestation approuvée par la police, ça s'appelle une parade.
Comme l'impératrice Anie Samson l'a fait remarquer, sur les 94 manifs ayant eu lieu en 2014, seules les actions du 15 mars et du 1er mai ont été ciblées. C'est une question TRÈS pertinente. Pourquoi seulement le 15 mars et le 1er mai ?
• C'est sûrement à cause du maudit itinéraire. Sauf que pour beaucoup de ces 94 manifestations de 2014, ou bien l'itinéraire n'est pas divulgué, ou bien l'itinéraire n'est pas respecté, justement parce que c'est ça, de la protestation.
• C'est sûrement à cause des gens qui vont à ces manifestations. Comme la police l'écrit si bien dans ses propres rapports, les gens qui se présentent aux manifs du 15 mars et du 1er mai sont de "méchants anarchistes". Sauf que c'est qui qui se présente tout le temps aux manifestations ? C'est tout le temps les mêmes personnes, c'est tout le temps nous autres ! Alors, expliquez-moi, expliquez-nous pourquoi on est tantôt des "méchants anarchistes" et tantôt des "bons anarchistes" ? Elle est où la différence ?
• C'est à cause de la sacro-sainte libre circulation des véhicules. Sauf que c'est ça le but d'une protestation, de perturber votre ordre et votre très Sainte-Économie. Vous vous êtes abrogé le droit de circuler 365 jours par année dans votre gros camion sale qui pue les sables bitumineux, alors croyez nous, qu'on se gênera pas de reprendre quelques bouts de rue pendant quelques petites heures.
• C'est à cause de la fameuse "violence". Sauf que le hockey, oui le bon vieux hockey, a causé des émeutes pas mal plus coûteuses. Le hockey a coûté beaucoup plus cher en précieuses vitrines de magasins de gros luxe dépravé que tout ce que le COBP, la CLAC, l'ASSÉ réunis n'ont jamais fait. Parce qu'au fond, ça n'a jamais rien eu à voir avec la violence, seulement avec le gros "cash", le gros "cash" qui pleure ses pauvres vitrines pétées tout en applaudissant les charges de chevaux au milieu des enfants.
C'est à cause de quoi, alors ? Au fond, la police cible le COBP et la CLAC juste parce que la police n'aime pas le COBP et la CLAC. La police nous aime pas, parce que ses opinions à elle ne sont pas les mêmes que les nôtres. C'est la définition la plus pure de profilage politique : Cibler un groupe simplement à cause de ses idées. Aux habitantes et habitants de Montréal, on veut passer le message suivant : Tant que vous avez la même opinion que la police, la police va tolérer votre présence. Mais le jour où votre opinion va différer de la leur attachez votre tuque avec des menottes en plastique, parce que les "goons" du SPVM vont venir vous fermer votre gueule, de gré ou de force.
Et ça, ça, on va toujours s'y opposer. Que ça s'appelle le règlement P-6, l'article 500.1, le projet de loi 78, on ne peut pas accepter une abrogation de la démocratie sur l'autel de ce que le SPVM appelle "la loi et de l'ordre". Parce que la loi et l'ordre actuel, c'est ce qui maintient les riches dans leur paradis fiscal et les pauvres dans l'enfer de la précarité. À leurs lois arbitraires, à leur ordre injuste, on leur répond avec la solidarité qui ne se trouve, ultimement, que dans la vraie démocratie de la rue.