Ce deuxième épisode de la seconde saison du Verger au complet porte sur le féminisme anticarcéral et prend la forme d'une entrevue avec Lux, qui est juriste et féministe antiraciste.
MUSIQUE
*Samuele - "La Sortie", tiré de l'album "Les filles sages vont au paradis, les autres vont où elles veulent", 2017, https://samuele.bandcamp.com/, utilisé avec la permission du groupe.
*Tribade - "Las Desheredadas", tiré de l'album "Las Desheredadas", 2019, https://www.tribaderap.com, utilisé avec la permission du groupe.
Ressources complémentaires
Livres
Pour elles toutes - Gwenola Ricordeau (https://luxediteur.com/catalogue/pour-elles-toutes/)
Beyond Survival - Ejeris Dixon et Leah Lakshmi Piepzna-Samarasinha (à l'édition) (https://www.akpress.org/beyond-survival.html)
Becoming Abolitionists - Derecka Purnell (voir le chapitre Sex, love & violence et la conclusion) (https://astrapublishinghouse.com/product/becoming-abolitionists-9781662600517/)
Alternatives au 911: https://cobp.resist.ca/fr/node/22666
Transcription
Intro générale :
Dans nos sociétés de surveillance, où tous nos moindres faits et gestes sont épiés, contrôlés, calculés, puis enregistrés dans d'immenses bases de données, réfléchir sur le rôle colonial, capitaliste et oppressif de la police et des prisons s'avère plus que jamais incontournable.
Quand de nouvelles vidéos d'interventions policières font scandale par leur violence raciste, les dirigeants les policiers et les politiciens parlent de pommes pourries. Mais si on observe la tendance de fond, ces bavures se répètent depuis des décennies. Les écarts de conduite des policiers sont systématiques; la violence policière est systémique.
Dans cette deuxième saison du Verger au complet, au menu, on vous propose des pistes de réflexion un peu plus spécifiques que les épisodes de la première saison. Toujours sous forme d'entrevues avec des personnes aussi passionnées que passionnantes, on abordera entre autre les impacts de ces institutions sur les travailleuses et travailleurs du sexe, la police au sein des communautés autochtones, le féminisme anti-carcéral, la militarisation de la police, la justice transformatrice et les prisons pour migrants et migrantes.
Attaquons-nous au Verger au complet !
Intro d'épisode
Avant de plonger dans l'épisode, on tient à vous avertir que cet épisode du Verger au complet traite de sujets sensibles, dont les violences sexistes et sexuelles.
L'État et la gendarmerie insistent sur le fait qu'il est nécessaire de protéger la population en emprisonnant les personnes qui auraient commis des crimes, et ce, peu importe la nature du crime ses motifs ou encore les désirs de la victime, s'il y en a. Le chemin vers la prison passe par le processus pénal: qui commence par l'arrestation, et qui est suivi de procédures juridiques menant à déclarer une personne criminellement responsable d'un acte commis. Ces mécanismes ont des conséquences catastrophiques sur l'ensemble des personnes détenues et leur entourage. De plus, ces dernières n'affectent pas les différentes franges de la population de la même manière. Qu'elles soient détenues, survivantes ou encore proches d'une personne incarcérée, les femmes, trans ou cisgenre, sont particulièrement affectées par le système pénal. Dans cet épisode du Verger au complet, on discute ainsi des enjeux liés au féminisme anti-carcéral avec lux, qui est juriste et s'implique dans différents collectifs féministes antiracistes et queers.
Q1 : Tout d'abord, comment est-il possible de définir le féminisme anti-carcéral ? Qu'est-ce qui le distingue du féminisme libéral ?
Lux : Premièrement, le féminisme libéral est un courant intéressé par l'égalité des droits. Il ne considère pas que le système en soit est de façon inhérente mauvais, mais plutôt que les inégalités proviennent du fait que les principes libéraux ne sont pas assez appliqués. Il suffirait donc de réformes juridiques pour atteindre l'égalité des genres. Le féminisme libéral c'est le féminisme mainstream, qu'on peut aussi appeler le féminisme bourgeois, parce qu'il avantage juste certaines femmes, soit les cis hétéra bourgeoises et blanches. On peut aussi dire que ce féminisme est un féminisme carcéral car il croit que la solution aux violences sexistes est la répression et l'emprisonnement des hommes qui commettent ces actes. Le féminisme anticarcéral s'oppose à cette vision et ne s'intéresse pas juste aux femmes blanches et bourgeoises, mais à toutes les femmes et les personnes de la diversité de genre. Donc, aussi aux femmes qui sont touchées par le système carcéral. Il considère que la prison est nuisible pour les femmes et pour les hommes et que ça ne favorise pas du tout une égalité des genres. Le féminisme anticarcéral est également un antiracisme et un anticapitalisme dans la mesure où il considère la prison comme un outil de contrôle des classes populaires et des personnes racisées. Autrement dit, le système pénal sert les intérêts du capitalisme et de la suprématie blanche en plus de renforcir le patriarcat.
Q2 : Pourquoi les féministes anti-carcérales ont-elles eu besoin de formuler une critique anti-carcérale dans une perspective féministe, plutôt que de se joindre à d'autres mouvements anti-prison, tels que les mouvements de libération des prisonniers et prisonnières politiques ou encore les anarchistes, qui sont traditionnellement contre les prisons ?
Lux : Une analyse féministe est nécessaire parce que la prison affecte différemment les hommes et les femmes. Je vais expliquer cela avec trois situations de femmes touchées de façon distincte par la prison. Cette catégorisation a été effectuée par Gwenola Ricordeau dans son livre Pour elles toutes.
Premièrement, il y a les femmes qui sont victimes de préjudice. Une façon par laquelle le système pénal ne les protège pas, c'est dans la définition même des crimes. Certains préjudices comme les difficultés à l'accès à l'éducation ou à la santé ne sont pas considérés comme des crimes. Ensuite, il y a aussi le fait que la plupart des violences sexuelles restent impunies par le système pénal dans la mesure que les femmes ne portent pas toujours plainte ou, en fait, peu souvent. Ou si le procureur général décide de pas poursuivre toutes les plaintes et souvent dans les procès, l'auteur des violences est trouvé non coupable ou, lorsqu'il l'est, les peines sont considérées trop minimes. De plus, il est à noter que le profil des victimes influence la sentence. Autrement dit, lorsque la victime est pauvre ou utilisatrice de drogue, cela peut amener une peine plus mince pour l'auteur des actes. Donc, le système pénal, en laissant largement impuni les crimes des hommes envers les femmes, sert les intérêt du patriarcat. Ça c'est un point que le féminisme mainstream partage, par contre, selon ce courant la solution serait que tous les hommes qui commettent ces actes soient amenés en prison. Nous on considère que le fait que des centaines de milliers d'hommes soit en prison n'est pas une solution féministe. Ce serait plutôt de l'ordre de la vengeance dans la mesure qu'étant donné le caractère structurel des violences sexuelles en prison, les auteurs de ces violences risquent d'en subir à leur tour aussi. De plus, cela enlève la possibilité pour la collectivité à travailler à transformer et réparer l'auteur de ces crimes. Aussi souvent la victime ne recherche pas la prison pour l'auteur, donc le système pénal ne répond pas aux besoins des victimes de retrouver une maitrise de leur vie. Puis aussi, le système pénal encourage les acteurs de violence à se prétendre innocent vu la menace de la prison, et donc cela n'encourage pas les auteurs à exprimer des remords.
Ensuite, il y a les femmes enfermées. Les femmes incarcérées appartiennent majoritairement aux classes populaires, sont issues de l'immigration ou de l'héritage colonial, un niveau d'éducation inférieur au reste de la population généralement et beaucoup de problème de santé mentale. Aussi, il y a une surreprésentaion des femmes lesbiennes et trans. Il faut noter qu'une grande partie des femmes en prison ont été victimes d'abus sexuels dans leur enfance, dans leur vie donc même si elles ne sont pas allées en prison pour le fait d'être victime, il faut prendre ça en considération. Il faut aussi prendre en compte que pour des raisons de socialisation, les femmes agissent plus rarement seules pour leurs crimes. Souvent il y a un homme dans le décors qui sans lui elle n'aurait pas commis le crime. Aussi il faut voir que les conséquences de la prisons sont différentes pour les femmes dans la mesure que elles se trouvent plus souvent isolées. Les hommes conjoints quittent plus les femmes incarcérées que ce que les femmes font aux hommes incarcérées. Elles ont aussi plus de difficulté à se trouver un partenaire par la suite. Aussi, il y a des femmes qui sont incarcérées pour l'homicide d'un proche, elles ont été des fois victime donc des fois elles sont enfermées pour s'être défendues face à la violence du patriarcat.
Finalement, il y a les femmes qui sont les proches des personnes incarcérées et donc à cause de la socialisation, ce sont surtout les femmes qui ont le rôle social du travail du care, du travail de soin. Donc c'est important de voir toutes les femmes qui ne sont pas en prison mais qui sont touchées par la prison. Il y a énormément de coûts monétaires mais aussi émotionnel par exemple le fait d'avoir son conjoint en prison c'est difficile pour la relation. Aussi souvent les proches vont ressentir de la honte, ils sont stigmatisés comme étant coupables par association. Ils peuvent aussi avoir des symptomes dépressifs. Donc c'est difficile être un proche d'une personne incarcérée.
Q3 : Le système de justice est intentionnellement compliqué, surtout lorsqu'on a pas fait des études en droit. Serait-il possible de nous expliquer ta conception du système de justice et à quoi pourrait ressembler une justice anticarcérale ?
Lux : Le système judiciaire et administratif peut être vu comme étant composé de plein de sous-systèmes. En ce qui concerne les préjudices qui sont criminalisés, il y a le système criminel, le système du droit civil et le système de l'IVAC (le programme d'indemnisation des victimes d'actes criminels). Voyons les fonctions de chacuns.
Le but du droit criminel c'est la dissuasion de la population par la menace de la prison, qui marche pas très bien en fait. Il y a aussi la rétribution et la punition donc c'est lié à l'idée qu'une infraction doit être punie, c'est proche de la vengeance d'une certaine façon. Il y a aussi la réhabilitation, un objectif très mal rempli par le système carcéral et l'élimination, éliminer la présence d'une personne dans la société, surtout dans le cas des peines à perpétuité. Donc il faut comprendre que dans le droit criminel il y a relation entre l'État et les individus. C'est parce qu'on considère qu'un individu a brisé le contrat social, qui est de respecter les lois, qu'il a envers l'État que celui-ci le réprime en retour. L'accent n'est pas mis sur le tort fait à la victime. La victime n'est qu'un témoin.
Dans le droit civil, le droit civil sert à gérer les relations entre les gens. Donc dans ce cas la victime va être agente, ce sera par exemple la personne demanderesse (la victime) contre la personne défenderesse (l'agresseur). Donc le droit civil peut couvrir les actes de violence, donc ceux à caractères sexuels. Dans ce système il y a le principe de responsabilité et réparation. Par exemple, pour un cas de violence à caractère sexuel, une victime pourrait recevoir de son agresseur un montant qui correspond aux dommages matériels et émotionnels qu'elle a subit. Ici l'État n'est pas une partie. Le problème est que, pareillement avec le système criminel, la menace de payer un montant élevé pèse sur la partie défenderesse ce qui fait en sorte que l'agresseur va tenter de se défendre et nier la version de la victime. Donc ça n'encourage pas vraiment la responsabilisation et l'accountability. Aussi, si jamais son agresseur est pauvre, la victime, son jugement ne lui servira pas parce que l'agresseur peut déclarer faillite et la victime ne pourra toucher à rien.
Finalement, il y a l'IVAC, qui est le système d'indemnisation des victimes d'actes criminels, qui a récemment été réformé. Ici, les victimes peuvent faire une demande pour recevoir un montant ou des services tels que des services psychologiques dépendamment de leur situation. Elles n'ont pas besoin d'avoir fait une plainte à la police, ni même de connaître le nom de leur agresseur. Donc c'est vraiment la relation État-victime ici qui est en jeu et le but est la réparation. On considère que le crime est un problème social pour lequel l'État doit assumer les coûts. Par contre, le problème ici c'est qu'on ne responsabilise pas les agresseurs parce qu'ils sont pas au courant qu'une demande a été faite. Les agresseurs ne sont donc pas responsabilisés dans ce système là.
On voit que ces deux derniers systèmes sont imparfaits mais même s'ils sont plus intéressants que le droit criminel qui lui est clairement oppressif. Donc une justice anticarcérale féministe, selon moi, metterait l'accent sur les principes de réparation, de responsabilisation (accountability), et de transformation. C'est une justice transformatrice qui prendrait en charge les besoins de la victime tels que les services psychologiques et autres puis la responsabilisation, donc mettre en place un cadre dans lequel les agresseurs les personnes qui ont commis des préjudices sont encouragées à prendre responsabilité sur ce qu'ils ont fait, à comprendre et à voir comment est-ce qu'ils peuvent demander pardon puis réparer d'une certaine façon les torts, s'engager à ne plus commettre de tels actes. Le tout en ayant les besoins des victimes en avant plan.
Q4: Une des questions centrales du féminisme anti-carcéral est celle des violences à caractère sexuel. Tu nous as parlé des façons dont les féministes anticarcérales veulent y remédier, notamment avec la justice transformatrice. Mais voudrais-tu élaborer un peu plus sur la perception ou la compréhension de ces violences d'un point de vue féministe anti-carcéral ?
Lux : La vision du féminisme anticarcéral est vraiment opposée à celle du système pénal dans la mesure que dans la conception du système pénal, ce sont des actes isolés, les violences sexistes et sexuelles. Ce sont des actes isolés faits par des individus isolés et donc la répression individuelle, ça marcherait. Dans le féminisme anticarcéral, on considère que étant donné le caractère systémique des violences sexuels, il y a un besoin d'une réponse systémique et pour un accent sur ce qui fonde les violence, c'est-à-dire le patriarcat. C'est important de voir les violences genrées comme s'inscrivant dans les système d'oppression comme le patriarcat, mais aussi la suprématie blanche et le capitalisme. Donc on peut pas combattre ces violences sans s'attaquer aux systèmes d'oppression. Donc ça passe par l'éducation la prévention, et aussi, comme mentionné plus tôt, la justice transformatrice. Et donc dans une conception où les agresseurs ne sont pas des monstres ni des exceptions. Je tiens à dire aussi que le féminisme anticarcéral ne cherche pas à blâmer les victimes qui utilisent le système pénal dans la mesure qu'il y a des fois peu de ressources pour avoir des processus de justice transformatrice, surtout avec des personnes qui ne sont pas dans nos communautés. Il faut donc le voir comme un échec collectif lorsqu'on a recours au système pénal et entreprendre des mesure qui favorise notre autonomie vis-à-vis le système pénal notamment par la justice transformatrice.
Q5 : Quelle est la vision des féministes anti-carcérales sur la police ?
Lux : Le féminisme anticarcéral il dépasse juste la prison dans le fond ça s'attaque au système pénal au complet. Dans ce sens, c'est peut-être mieux de parler d'abolitionnisme pénal féministe. Donc, il s'attaque à l'ensemble des institutions qui concernent la pénalité, c'est-à-dire police, la justice criminelle puis la prison, mais aussi à toutes les mesures post-prison telles que la probation ou avoir les agents de probation, etc. Donc l'abolitionnisme pénal n'est pas réductible aux luttes seulement contre la prison. C'est aussi intéressant de ne pas avoir cet accent là mis juste sur les prisons dans la mesure qu'il y a aussi des mesures comme le bracelet électronique qui dépasse les murs de la prison mais qui constitue de la surveillance et qui concerne la pénalité. Donc la police c'est une institution répressive et donc opprimante dans son essence même donc c'est sur que les féministes anticarcérales s'y opposent également.
Q6: Quels sont les collectifs féministes anti-carcéraux actifs à Tiohtià:ke/Montréal ? En quoi consiste leur travail ?
Lux : Il n'y en a pas tout à fait, en fait il y a des collectifs contre les prisons, comme le collectif Contre les prisons, Anticarceral Group qui j'imagine doivent avoir une féministe aussi dans leur travail. Sinon il y a aussi la collective Féminisme et droit associé à l'UQAM qui est composé de militantes juristes de gauche qui dans le passé ont eu des activités sur le féminisme anticarcéral parce que certaines s'intéressent notamment à la profession de criminaliste, soit la défense de personnes accusées ou pratiquer le droit carcéral pour améliorer les conditions de vie des personnes détenues. Mais le collectif ne se concentre pas juste sur les luttes anticarcérales. Ce qui veut dire que le terrain est là pour des groupes qui voudraient ce se former, des groupes féministes anticarcérales qui voudraient se former. Je crois que ce serait vraiment pertinent.
Conclusion:
Comme nous l'avons vu dans cet épisode, le système carcéral n'est pas une solution souhaitable pour répondre aux violences sexistes. Non seulement tout le monde n'est pas égal devant le système de justice, mais les prisons ne règlent en rien les violences du patriarcat, elles les accentuent. Or, il n'existe pas de solution unique pour réparer les torts causés à autrui, ni pour guérir des blessures subies. C'est pourquoi nous devons réfléchir dès aujourd'hui aux moyens les plus adaptés à nos besoins et nos réalités. Plusieurs ouvrages proposent des pistes pour régler nos conflits avec une justice transformatrice et de nombreuses alternatives à la police et au 911 existent déjà. On vous laisse en description une liste de ces outils!
C'est tout pour cet épisode du Verger au complet, on vous revient sous peu avec du nouveau contenu et, d'ici là, la manifestation anuelle du Collectif Opposé à la Brutalité Policière aura lieu ce 15 mars à 17h30, au métro Lionel-Groulx. La manif a pour thème cette année: "La police, c'est colon en crisse!" On se voit dans la rue!
Translation
Additional resources
Books :
Pour elles toutes - Gwenola Ricordeau (https://luxediteur.com/catalogue/pour-elles-toutes/)
Beyond Survival - Ejeris Dixon and Leah Lakshmi Piepzna-Samarasinha (editing) (https://www.akpress.org/beyond-survival.html)
Becoming Abolitionists - Derecka Purnell (see Sex, love & violence chapter and conclusion) (https://astrapublishinghouse.com/product/becoming-abolitionists-9781662600517/)
For alternatives to 911, see: https://cobp.resist.ca/fr/node/22666
General introduction
In our surveillance societies, where our every move is spied on, controlled, calculated, and then recorded in huge databases, reflecting on the colonial, capitalist and oppressive role of the police and prisons is more than ever necessary.
When new videos of police interventions are scandalized by their racist violence, the leaders, the police and the politicians talk about bad apples. But if we look at the basic trend, these blunders have been repeated for decades. Police misconduct is systemic; police violence is systemic.
In this second season of The Orchard, we offer you a more specific way to think about this issue than the first season's episodes. Still in the form of interviews with people as passionate as they are passionate, we will address, among other things, the impacts of these institutions on sex workers, policing in Aboriginal communities, anti-custodial feminism, the militarization of the police, transformative justice and prisons for migrants.
Let's take on the whole Orchard!
Episode intro
Before diving into the episode, we want to warn you that this episode of The Whole Orchard deals with sensitive topics, including gender and sexual violence.
The state and its gendarmes insist that it is necessary for the protection of the population to imprison those who have committed crimes, regardless of the nature of the crime and its motives or the wishes of the victim if there are any. The path to prison is through the criminal process: arrest, followed by legal proceedings that lead to a person being found criminally responsible for an act committed. These mechanisms have catastrophic consequences on all detained persons and their entourage. Moreover, it does not affect different segments of the population in the same way; whether they are inmates, survivors, or loved ones of an incarcerated person, women, whether trans or cisgender, are particularly affected by the criminal justice system. In this episode of The Whole Orchard we discuss issues related to anti-cartel feminism with lux, who is a lawyer and is involved in various feminist anti-racist and queer collectives.
Q1: First, how is it possible to define anti-carcenary feminism? What distinguishes it from liberal feminism?
Lux R1: First of all, liberal feminism is a movement interested in equal rights. It does not consider that the system itself is inherently bad, but rather that inequalities arise because liberal principles are not applied enough. Therefore, legal reforms are all that is needed to achieve gender equality. Liberal feminism is mainstream feminism, which can also be called bourgeois feminism, because it only benefits certain women, i.e. straight bourgeois and white women. We can also say that this feminism is prison feminism because it believes that the solution to gender-based violence is the repression and imprisonment of the men who commit these acts. Anticarceral feminism opposes this view and is not just concerned with white, bourgeois women, but with all women and people of gender diversity. Thus, also women who are affected by the prison system. It considers that prison is harmful for women and men and that it does not promote gender equality at all. Anti-prison feminism is also anti-racism and anti-capitalism in that it sees prison as a tool for controlling the working classes and racialized people. In other words, the penal system serves the interests of capitalism and white supremacy and reinforces patriarchy.
Q2: Why did anti-prison feminists need to formulate an anti-prison critique from a feminist perspective, rather than joining other anti-prison movements, such as political prisoner liberation movements or anarchists, who are traditionally anti-prison?
Lux R2: A feminist analysis is necessary because prison affects men and women differently. I will explain this with three situations of women affected by prison in distinct ways. This categorization was made by Gwenola Ricordeau in her book Pour elles toutes.
First, there are women who are victims of prejudice. One way in which the criminal justice system does not protect them is in the very definition of crimes. Some prejudices, such as difficulties in accessing education or health care, are not considered crimes. Then there is also the fact that most sexual violence goes unpunished by the criminal justice system insofar as women do not always file complaints or, in fact, rarely do so. Or if the public prosecutor decides not to pursue all complaints and often in the trials, the perpetrator of the violence is found not guilty or, when he is, the penalties are considered too minimal. In addition, it should be noted that the profile of the victims influences the sentence. In other words, when the victim is poor or a drug user, this can lead to a lower sentence for the perpetrator. So, the penal system, by leaving largely unpunished the crimes of men towards women, serves the interests of patriarchy. This is a point that mainstream feminism shares, however, according to this current the solution would be that all men who commit these acts should be taken to prison. We consider that the fact that hundreds of thousands of men are in prison is not a feminist solution. It would be more like revenge, because given the structural nature of sexual violence in prison, the perpetrators of this violence are likely to suffer in turn. Moreover, this removes the possibility for the community to work on transforming and repairing the perpetrator of these crimes. Also, the victim often does not seek prison for the perpetrator, so the criminal justice system does not meet the needs of victims to regain control of their lives. Also, the criminal justice system encourages perpetrators of violence to pretend to be innocent because of the threat of prison, so it does not encourage perpetrators to express remorse.
Then there are the women in prison. Women in prison are predominantly working class, of immigrant or colonial heritage, with a lower level of education than the rest of the population generally and many mental health problems. Also, there is an overrepresentation of lesbian and trans women. It should be noted that a large proportion of the women in prison have been victims of sexual abuse in their childhood, in their lives, so even if they did not go to prison for being a victim, this must be taken into consideration. We must also take into account that for reasons of socialization, women rarely act alone for their crimes. Often there is a man in the scene that without him she would not have committed the crime. Also it is necessary to see that the consequences of the prison are different for the women in the measure that they are more often isolated. Male partners leave incarcerated women more than women do to incarcerated men. They also have more difficulty finding a partner afterwards. Also, there are women who are incarcerated for the homicide of a loved one, they were sometimes victims so sometimes they are locked up for defending themselves against the violence of patriarchy.
Finally, there are women who are the relatives of the incarcerated persons and therefore because of the socialization, it is mostly women who have the social role of the care work. So it is important to see all the women who are not in prison but who are affected by prison. There are a lot of monetary costs but also emotional costs, for example, having your spouse in prison is difficult for the relationship. Also often the relatives will feel shame, they are stigmatized as being guilty by association. They can also have depressive symptoms. So it's hard to be a loved one of an incarcerated person.
Q3: The justice system is intentionally complicated, especially if you did not go to law school. Would it be possible to explain your conception of the justice system and what an anti-cartel justice might look like?
Lux R3: The judicial and administrative system can be seen as being composed of many sub-systems. In terms of the harms that are criminalized, there is the criminal system, the civil law system and the VCI system (the criminal injuries compensation program). Let's look at the functions of each.
The purpose of the criminal law is to deter the population by the threat of prison, which does not work very well. There is also retribution and punishment, so it is related to the idea that an offence must be punished, it is close to revenge in a way. There is also rehabilitation, an objective that is very poorly fulfilled by the prison system, and elimination, eliminating a person's presence in society, especially in the case of life sentences. So we must understand that in criminal law there is a relationship between the State and the individuals. It is because we consider that an individual has broken the social contract, which is to respect the laws, that the State represses him in return. The emphasis is not on the harm done to the victim. The victim is only a witness.
In civil law, civil law is used to manage relations between people. So in this case the victim is going to be an agent, it will be for example the plaintiff (the victim) against the defendant (the aggressor). So the civil law can cover acts of violence, therefore those of a sexual nature. In this system there is the principle of responsibility and reparation. For example, in a case of sexual violence, a victim could receive from her aggressor an amount that corresponds to the material and emotional damage she has suffered. Here the State is not a party. The problem is that, as with the criminal system, the threat of paying a large amount of money weighs on the defendant, so the abuser will try to defend himself and deny the victim's story. So it doesn't really encourage responsibility and accountability. Also, if the aggressor is poor, the victim's judgment will not be useful because the aggressor can declare bankruptcy and the victim will not be able to touch anything.
Finally, there is the IVAC, which is the criminal injuries compensation system, which was recently reformed. Here, victims can apply to receive an amount or services such as psychological services depending on their situation. They don't have to have made a complaint to the police, or even know the name of their abuser. So it is really the state-victim relationship that is at stake here and the goal is reparation. We consider that crime is a social problem for which the State must assume the costs. On the other hand, the problem here is that the aggressors are not made responsible because they are not aware that a request has been made. So the aggressors are not made responsible in this system.
We can see that these last two systems are imperfect, but even so, they are more interesting than the criminal law, which is clearly oppressive. So a feminist anti-cartel justice, in my view, would emphasize the principles of reparation, accountability, and transformation. It's a transformative justice that would take care of the needs of the victim such as psychological and other services and then accountability, so putting in place a framework in which abusers - people who have done harm - are encouraged to take responsibility for what they have done, to understand and see how they can ask for forgiveness and then in some way make amends, commit to not doing it again. All with the needs of the victims in mind.
Q4: One of the central issues in anti-carceral feminism is sexual violence. You've talked to us about the ways in which anti-cartel feminists want to address it, including with transformative justice. But would you like to elaborate a bit more on the perception or understanding of this violence from an anti-carceral feminist perspective?
Lux R4: The vision of anti-cartel feminism is really opposed to that of the penal system insofar as in the conception of the penal system, these are isolated acts, sexist and sexual violence. They are isolated acts done by isolated individuals and therefore individual repression would work. In anti-cartel feminism, we consider that given the systemic nature of sexual violence, there is a need for a systemic response and for a focus on what underlies the violence, that is, patriarchy. It's important to see gendered violence as part of systems of oppression like patriarchy, but also white supremacy and capitalism. So we can't fight this violence without attacking the systems of oppression. So that means education, prevention, and also, as mentioned earlier, transformative justice. And therefore in a conception where the aggressors are not monsters or exceptions. I also want to say that anti-cartel feminism does not try to blame the victims who use the penal system, as there are sometimes few resources to have transformative justice processes, especially with people who are not in our communities. We must therefore see it as a collective failure when we resort to the criminal system and undertake measures that promote our autonomy vis-à-vis the criminal system, particularly through transformative justice.
Q5: What is the anti-custodial feminists' view of the police?
Lux A5: Anti-cartel feminism is just about going beyond prison and basically attacking the entire penal system. In that sense, maybe it's better to call it feminist penal abolitionism. So, it attacks all the institutions that deal with penality, that is to say police, criminal justice and then prison, but also all the post-prison measures such as probation or having probation officers, etc. So penal abolitionism is not reducible to struggles only against prison. It's also interesting that we don't just have this focus on prisons because there are also measures like the electronic bracelet that go beyond the walls of the prison but which constitute surveillance and which concern the penality. So the police is a repressive institution and therefore oppressive in its very essence, so it is certain that anti-cartel feminists are also opposed to it.
Q6: What are the feminist anti-prison collectives active in Tiohtià:ke/Montreal? What do they do?
Lux R6: There are not really any, in fact there are collectives against prisons, like the collective Against Prisons, Anticarceral Group which I imagine must have a feminist in their work too. Otherwise, there is also the collective Féminisme et droit associé à l'UQAM which is composed of left-wing legal activists who in the past have had activities on anti-prison feminism because some of them are interested in the profession of criminal lawyer, that is to say the defense of accused persons or the practice of prison law to improve the living conditions of detainees. But the collective is not just focused on anti-prison struggles. Which means that the ground is there for groups that would like to form, feminist anti-prison groups that would like to form. I think that would be really relevant.
Conclusion:
As we have seen in this episode, the prison system is not a desirable solution to gender-based violence. Not only is not everyone equal before the justice system, prisons do not address patriarchal violence, they exacerbate it. However, there is no single solution to repair the harm caused to others, nor to heal the wounds suffered. This is why we must think today about the means best adapted to our needs and realities. Several books propose ways to resolve our conflicts with a transformative justice and many alternatives to the police and 911 already exist. We leave you with a list of these tools!
That's all for this episode of the Orchard, we'll be back soon with new content and, until then, the annual demonstration of the Collective Opposed to Police Brutality will take place this March 15 at 5:30 pm, at Lionel-Groulx metro. The theme of this year's demonstration is "Shut down colonial police!" See you in the street!