La souricière est une stratégie policière qui fonctionne en condensant une manifestation entre deux coins de rue, afin de pouvoir utiliser qu'une cinquantaine de policiers à chaque bout, pour arrêter un maximum de manifestantEs. Pour condenser la manifestation, elle se sert du momentum qui réside en elle : puisque le groupe est en mouvement, lorsque la tête stoppe brusquement, le reste de la manifestation continue à avancer pendant un bon moment avant que la tête cesse d'avancer. C'est pourquoi la plus simple précaution contre les souricières est simplement d'avoir des éclaireurs un coin de rue devant les manifestations : il est possible de voir les déploiements policiers, qui, pour essayer d'arrêter un maximum de personnes, sortent de leur embuscade à la dernière minute, pour s'assurer que la rue soit remplie de manifestantEs.
Le premier blocage est évidemment fragile, puisque le minimum de policier nécessaire y est attribué, lorsqu'un encerclement est décidé. La raison est logistique : le commandement tente d'arrêter la manifestation le plus rapidement possible, et dispose de moyen de transports limités pour faire venir 10, 20 ou 30 policiers, avec leur casques, boucliers, etc. Si vous avez déjà eu à rouler au centre-ville dans le trafic, vous pouvez facilement vous imaginer le défi logistique de faire parvenir trois minivans deux coins de rue avant une manifestation, dans le trafic causé par la manifestation elle-même. C'est pour ca que souvent, une quinzaine de minutes sont nécessaires entre l'arrêt du devant de la manifestation et l'encerclement en tant que tel. Par la suite, les autres issues sont scellées, et les policiers tentent de voir si des gens s'échappent massivement par des ruelles, porte cochères, etc. Il semble logique que le commandement déplace les policiers vis-à-vis des zones les plus difficiles à sécuriser : devant, côté, protéger le dos des policiers lorsque des manifestantEs protestent l'arrestation de leurs camarades. Finalement, la foule est comprimée pour réduire le nombre d'effectif nécessaire.
C'est pourquoi les trente premières secondes sont cruciales pour toute souricière : les policiers sont souvent très peu nombreux, et tout mouvement de foule permettant une évasion de masse leur nécessite de nouveaux déploiements, de nouvelles interventions, et si la tête, la queue et les côtés semblent céder, les renforts seront excessivement difficiles à assigner aux bonnes positions.
Par contre, les policiers sont excessivement à risque d'être encerclés aussi, et lorsque des groupes parviennent à prévenir les renforts d'être envoyés à un groupe de policier isolé, ils deviennent à risque et doivent être extraits par le commandement. Ainsi, un groupe de policier visant à encercler des manifestantEs peut facilement se faire prendre à son propre jeu.
Ainsi, lors d'une souricière, il est important de bien connaître le quartier dans lequel on se situe, notamment, la largeur des coins de rue. Dans Villeray par exemple, les rues est-ouest sont très rapprochées, et les rue nord-sud le sont deux ou trois fois moins. De plus, il est essentiel d'être à l’affût des mouvements de foule. Si une manifestation qui fait plus d'un coin de rue se fait stopper à l'avant, il faut absolument repartir le plus rapidement possible en direction inverse pour prévenir l'arrestation d'une partie des camarades. Si des policiers peu nombreux sont presque déployés et que vous êtes à l'avant (et que vous n'avez pas été avisés que vous êtes en état d'arrestation), il est utile de créer une commotion chez ceux-ci en tentant de courir, de les contourner, etc. Si trois policiers sont sur vous, ils ne sont pas sur vos camarades. Il est interdit de résister à son arrestation, mais vous n'êtes dans aucune obligation de collaborer, de vous diriger où on vous le demande, de donner autre information que son nom et sa date de naissance. Tout édifice doit être sondé pour des portes débarrées, des fenêtres ouvertes, etc. Les portes de feu peuvent souvent être ouvertes de l'intérieur, si vous avez des amis à l'extérieur de la souricière.
Toutefois la meilleure protection contre les souricières, c'est notre nombre. Parce qu'on est encore peu nombreux, la police peut empêcher les événements anticapitalistes de se produire, et les manifestations auront toujours de la difficulté à atteindre une masse critique tant que les risques d'arrestations resteront élevés. Alors il faut apprendre les stratégies policières, pour réduire ces risques d'arrestations, pour prendre notre droit de manifester, contre tout ce que l'on trouve injuste. Nous sommes déjà harceléEs, attaquéEs, blesséEs par ces policiers, et si l'on veut continuer à prendre notre droit de manifester, il faudra assumer que c'est parfois mieux de se faire arrêter pour quelque chose que de se faire arrêter pour rien. ☐