Les sommets du G20 servent de lieux de rencontre pour leaders politiques, ministres des finances et directeurs des banques centrales et institutions financières internationales. Lors de ces rencontres sont créés des consensus qui sont essentiels à la réorganisation économique mondiale et néolibérale. Afin d’informer la population des consensus obtenus pendant les 2-3 jours de réunion, le G20 produit un communiqué et une compilation des déclarations des leaders. Le tout est censé résumer en quelques pages l’ensemble du travail qui a été accompli. Le G20 utilise un langage plutôt vague et insipide pour faire passer en douce des consensus qui ont, dans les faits, des répercussions extrêmement destructives sur le plan socioéconomique. Le G20 est aussi un grand spectacle médiatique qui sert à légitimer ce processus au sein de l'opinion publique. Pour mieux comprendre le langage du G20 il est important d’analyser les termes, implications et contradictions qui traversent ses déclarations publiques.
Dans le mandat du G20 on peut lire :
« Le G20 est le premier forum pour notre développement économique international qui encourage une discussion ouverte et constructive entre les pays industriels et les pays émergents sur des défis clés en lien avec la stabilité économique globale. »
Dans la Déclaration des leaders du sommet du G20 de Londres, le 2 avril 2009, on peut lire dans le point 3, en guise de réflexion et de solution face à la crise, que la « prospérité est indivisible : que la croissance, pour être soutenable, doit être partagée. » La fin de ce paragraphe affirme aussi nettement l’orientation et l’intention du G20 lorsqu’il est écrit, « Nous croyons que la seule fondation sûre pour une mondialisation durable et une augmentation de la prospérité pour tous est une économie mondiale ouverte basée sur les principes du marché, la régulation efficace et de fortes institutions mondiales. »
Il n’y a donc aucune remise en question du système capitaliste et des fondements injustes qu’il nécessite pour fonctionner, des crises qui lui sont inhérente, ni aucune analyse du fait que ces crises sont conséquences des dynamiques générées par ce système, et non de simples problèmes d’ajustements et de régulation.
On nous parle de «…régulation efficace…» alors que la dérégulation est un des points centraux de la pensée néolibérale et que celle-ci est une des causes de la crise financière. On nous annonce que c’est seulement à travers ce même courant économique qu’on va trouver les solutions.
On nous annonce «…une économie mondiale ouverte basée sur (…) de fortes institutions mondiales…». En d’autres mots, que ce sont les institutions qui détruisent complètement les acquis sociaux, et qui appliquent avec le plus de vigueur la privatisation (FMI, Banque mondiale), qui vont nous aider dans ce travail de réorganisation économique.
Par «… stabilité économique globale…», on entend que soient créées les conditions nécessaires pour garantir les profits, bénéfices des actions et des patrons et la rentabilité des compagnies, même si celles-ci fonctionnent grâce à une profonde oppression et exploitation des humains et des écosystèmes. Lorsque celle-ci ne s’obtient pas à cause de la contestation majeure des opprimé-e-s par ces méthodes, la force est employée pour obtenir cette stabilité. En témoigne les nombreuses dictatures en Amérique latine, qui sont presque chaque fois accompagnées d’un plan de réorganisation économique néolibéral qui avantage les oligarchies et désavantage l’ensemble des populations.
Dans le point 4 de la même déclaration, on nous propose les solutions suivantes pour résoudre la crise économique. Examinons donc ces prétendues solutions :
1) «- Restaurer la confiance, la croissance et l’emploi»
Lorsqu’on parle de restaurer la confiance, on parle en fait de la confiance en l’investissement, aux actifs financiers, aux éléments essentiels à la spéculation. Cette dernière augmente grandement la concentration des richesses et provoque en soi de grandes fluctuations économiques, tout en créant un rapport qui ne concorde pas avec l’état réel des choses. L’ensemble de la production est transformée en objet spéculatif et sa gestion est axée sur son potentiel de création de profit plutôt que sur le bien-être de la population et des écosystèmes.
La croissance permanente est quelque chose d’inconcevable en soi, puisque nous vivons dans un monde dont les ressources sont limitées. La croissance permanente est créée à travers l’appropriation des ressources, leur mise en valeur au travers du processus de production et la vente des produits et services finaux. Pour continuer à être compétitives, les compagnies doivent s’assurer d’obtenir les coûts de production les plus bas possibles. Ceci crée un incitatif solide à produire avec les conditions de travail les moins coûteuses possibles. Ainsi la croissance serait plutôt un phénomène de concentration des richesses et non d’augmentation de celle-ci.
Le capitalisme n’a pas comme but premier de créer de l’emploi et de produire des objets et services utiles aux bien-être humain, mais bien de générer du profit. C'est ce que nous affirme Milton Friedman, père du néolibéralisme, lorsqu'il dit que la seule fonction d'une entreprise, c'est de faire de l'argent. L’emploi, le capitalisme ne le fournit que dans la mesure où il est nécessaire à la création du profit des patrons, actionnaires et banques, et au maintien des activités de l’entreprise. S’il n’est pas nécessaire, des milliers de gens seront laissés pour compte comme en témoigne les nombreux bidonvilles de ce monde.
2) «- réparer le système financier pour restaurer les prêts
- renforcir la régulation financière pour reconstruire la confiance
- financer et réformer nos institutions financières internationales pour résoudre la
crise et prévenir les prochaines»
Comment peut on croire que c’est à travers le système financier que l’on va pouvoir régler les problèmes économiques mondiaux, alors que c’est lui qui est à l’origine de la dernière crise et qui incite des modes de gestion qui n’ont rien à voir avec les besoins réels de l’être humain et des écosystèmes. Dans plusieurs lieu du monde, des gestionnaires et des entreprises sont amenés à prendre des mesures qui sont totalement contre-productives sous le seul prétexte que la rentabilité de l’entreprise ne sera pas possible si les actions de celles-ci n’ont pas un profit espéré intéressant et sécuritaire pour les actionnaires. De plus, l’implication de plus en plus grande des investissements spéculatifs augmente de beaucoup les fluctuations de l’économie capitaliste, et ce, au détriment de la majeure partie de la population. D’une part, lorsqu’une entreprise est en difficulté et qu’elle aurait grandement besoin de fonds supplémentaires, les risques de pertes en rendements espérés des actions peuvent entraîner une vente majeure de celles-ci, provoquant ainsi la baisse de leur valeur et créant une perte de fonds pour l’entreprise. Mais si les profits espérés sont positifs, les fonds affluent. Ce processus a pour conséquence une plus grande concentration économique. D'autre part, la spéculation peut faire varier grandement les coûts des ressources nécessaires à la production et les prix de ventes des produits et services offerts.
3) «- promouvoir les échanges et investissements internationaux et rejeter le protectionnisme, pour obtenir la prospérité»
Les grandes puissances économiques mondiales qui vantent le libre-échange sont les premières à trahir ce même principe pour se tailler une place stratégique dans le capitalisme international. Il est très clair que presque tous les pays industrialisés ont d’abord dû mettre en place un protectionnisme intense afin de protéger leur industrie naissante de la compétition internationale. Il est bien facile de promouvoir l’ouverture des marchés une fois qu’un pays a déjà mis en place tous les instruments nécessaires pour assurer sa compétitivité. Derrière cette supposée libéralisation du marché se cache un impérialisme économique sans pitié.
4) «- construire une remontée économique inclusive, verte et durable»
La crise écologique est conséquence du capitalisme car les dynamiques créées par les interactions compétitives du marché force l'utilisation la plus rapide possible des biens communs de la nature (ressources naturelles), et ce, au moindre coût afin d’assurer aux compagnies leur viabilité économique au sens capitaliste. Elle n’est aucunement basée sur les systèmes écologiques et ne répond qu’à sa propre dynamique. Dans le communiqué du 7 novembre 2009 du sommet du G20 au Royaume-Uni, on nous affirme que le G20 « … s’est engagé à prendre action afin de résoudre la menace des changements climatique et de travailler vers d’ambitieuses solutions à Copenhague…» réunion qui fut universellement considérée comme une catastrophe monumentale. Pas étonnant, puisque le G20 prétend que «… la seule fondation sûre pour une mondialisation durable et une augmentation de la prospérité pour tous est une économie mondiale ouverte basée sur les principes du marché… ».
Le G20 propose de régler les problèmes en reproduisant le système économique qui les créent… Autant dire qu’il nous faut arrêter de couper les arbres en les coupant plus !