Pour ce premier épisode de la seconde saison du Verger au complet, on vous présente une entrevue avec Sandra Wesley, directrice générale de Stella, un organisme par et pour les travailleuses du sexe qui existe depuis plus de 25 ans et qui oeuvre à la défense des droits de ces travailleuses. Elle aborde notamment les relations entre la police et les travailleuses du sexe et les impacts des dernières lois sur leur travail.
Le verger au complet - saison 2, épisode 1: La répression policière contre les travailleuses du sexe
MUSIQUE
Merci aux artistes qu'y nous ont donné la permission d'utiliser leurs chansons
- Devon Michigan, "November 8th", tiré de l'album du même nom: https://devonmichigan.bandcamp.com/, utilisé avec la permission du groupe.
- Les ogres de Barback, "Rue de Panam", tiré de l'album "Rue du temps" : https://lesogres.com/, utilisé avec la permission du groupe.
- Claude L'Anthrope, "Les lumières ont tué la nuit", tiré de l'album du même nom : https://claudelanthrope.bandcamp.com/, utilisé avec la permission du groupe.
Références
Le site web de Stella : https://chezstella.org/publications/
Introduction générale de la saison 2
Dans nos sociétés de surveillance, où tous nos moindres faits et gestes sont épiés, contrôlés, calculés, puis enregistrés dans d'immenses bases de données, réfléchir sur le rôle colonial, capitaliste et oppressif de la police et des prisons s'avère plus que jamais incontournable.
Quand de nouvelles vidéos d'interventions policières font scandale par leur violence raciste, les dirigeants les policiers et les politiciens parlent de pommes pourries. Mais si on observe la tendance de fond, ces bavures se répètent depuis des décennies. Les écarts de conduite des policiers sont systématiques; la violence policière est systémique. Malgré cela, le lobby policier réussi à éviter sa remise en question en pointant du doigts les gangs de rue, la prolifération des armes à feu ou d'autres épouvantails pour justifier des augmentations budgétaires constantes.
Alors que la crise climatique est imminente, que les prisons pour migrantes et migrants se construisent et se remplissent à vu d'oeil et que le racisme systémique se perpétue sans entrave et que celleux qui payent le prix sont toujours les mêmes, l'argent ne cesse de couler à flot vers les forces policières et les institutions carcérales. À coup de millions, l'État permet à la police d'être toujours plus armée et aux prisons d'être toujours plus bondées. Or, aussi effrayantes et omniprésentes soient-elles, ces institutions peuvent être détruites; historiquement, énormément de communautés ont vécu sans police ni prison !
L'histoire de la police et des prisons sur l'ile de la Tortue est bien documentée. Il s'agit d'un horrible récit où des colons ont mis sur pieds des institutions pour réprimer toute forme de contestation à l'ordre capitaliste et colonial. Ce sont la police et les prisons qui ont permis aux bourgeois blancs de mettre en place un développement raciste sur un territoire ne leur ayant jamais été cédé. Les différentes communautés autochtones ont été les premières à souffrir de ces institutions, et sont encore à ce jour largement sur-représentées parmis les victimes de la police et dans les prisons.
Dans cette deuxième saison du Verger au complet, au menu, on vous propose des pistes de réflexion un peu plus spécifiques que les épisodes de la première saison. Toujours sous forme d'entrevues avec des personnes aussi passionnées que passionnantes, on abordera entre autre les impacts de ces institutions sur les travailleuses et travailleurs du sexe, la police au sein des communautés autochtones, le féminisme anti-carcéral, la militarisation de la police, la justice transformatrice et les prisons pour migrants et migrantes.
Il est grand temps d'en finir avec la vision libérale hypocrite et mensongère voulant que tous les vices de la police soient le fruit de quelques pommes pourries. Des racines aux bourgeons, les services de polices de tous les paliers sont autant de pommiers dégeulasses dans un horrible verger de pourriture(s). Attaquons-nous au Verger au complet !
Introduction de l'épisode On le sait, la police ne discrimine et n'opprime pas également tous les groupes sociaux. On la voit rarement dans Westmount, alors que l'on sait très bien que les milliards détournés dans les paradis fiscaux ne proviennent pas de Montréal-Nord! La police est continuellement en train de faire du profilage social et racial et ce sont souvent les groupes moins représentés dans l'espace public qui subissent la surveillance, le harcèlement, la violence et la discrimination policière. En s'acharnant particulièrement sur ces groupes, les policiers utilisent leur autorité pour faire avancer leurs lignes politiques d'extrême-droite, patriarcales et moralisatrices. Par exemple, les personnes qui font du travail du sexe sont particulièrement visées par la police et par le fait même, surreprésentées dans les prisons. De plus, les personnes qui pratiquent le travail du sexe ont été particulièrement affectées par les mesures mises en place par les politiciens lors de la pandémie.
À Montréal, Stella, un organisme par et pour les travailleuses du sexe qui existe depuis plus de 25 ans, oeuvre à la défense des droits de ces travailleuses. Pour ce premier épisode de la seconde saison du Verger au complet, on discute avec Sandra Wesley, directrice générale de Stella et militante de longue date pour les droits des travailleuses du sexe.
Entrevue
Q1 : Première question, pour mieux se situer, comment définirais-tu le travail du sexe?
Sandra : Donc le travail du sexe c’est une catégorie là, qui inclut beaucoup beaucoup de choses, c’est un terme politique en fait qu’on s’est donné en tant que communauté pour toutes se rejoindre dans une lutte ensemble donc c’est tout travail où on échange des services sexuels contre de l’argent ou contre autre chose aussi, parfois dans des économies informelles on peut parler d’échanger contre de la drogue, échanger contre une place où dormir ou peut importe d’autre chose, et donc ça inclus plusieurs sphères, ça inclut les personnes qui travaillent dans la pornographie, ça inclut les personnes dans les bars de danseuses, les salons de massage, les escortes, les personnes qui travaillent sur la rue, donc des personnes qui travaillent dans des… dans des endroits très très très formels, dans des endroits très informels, de façon indépendante, qui travaillent aussi pour d’autres personnes, donc ça inclut là toute une… une catégorie de personnes, pis à la fin ce qu’on a en commun, c’est qu’on échange des services sexuels contre quelque chose, généralement de l’argent et que pour nous évidemment c’est un travail donc c’est une activité économique, c’est pas une exploitation inhérente qu’on subit, même si le travail est une exploitation inhérente, mais pas plus spécifique, donc c’est vraiment quelque chose qu’on fait pour payer nos factures généralement.
Q2 : Quelles sont les relations typiques entre la police et les travailleuses du sexe? Sandra : Eh, donc c’est sur que les relations sont très négatives entre les polices et les travailleuses du sexe, donc on sait qu’on a des unités entières au SPVM dédiées à trouver les travailleuses du sexe et nous harceler de tout sorte de façons souvent sous l’égide de la moralité, peu importe comment les lois changent, le SPVM a encore cette attitude là qu’on est immorales et qu’on a besoin d’être eh… d’être eh… d’être surveillées, d’être contrôlées… et depuis 2014 le travail du sexe est entièrement criminalisé au Canada, euh… et cette nouvelle criminalisation là elle vient aussi avec un changement d’attitude envers nous, on est passées de criminelles à victimes d’exploitation, même si on commet des crimes, c’est pas très logique, mais c’est la… la vision du gouvernement actuel, donc les policiers maintenant un mandat de nous sauver en plus de… de nous criminaliser et ça les rend encore plus agressifs, encore plus violents, encore plus créatifs dans les façons de nous déshumaniser. Un exemple avec le SPVM récemment c’est l’opération Radar, donc c’est une opération du SPVM où ils ont demandé à tous les employé-e-s des hôtels et des taxis de l’industrie du tourisme de savoir comment repérer une travailleuse du sexe, vraiment sur la base de profilage là… complètement absurde et de nous dénoncer à la police, sous la guise que on est sûrement toutes exploitées et que ce serait une façon de nous sauver qu’on est probablement toutes mineures, etc. Donc la police est en train de mobiliser le citoyen moyen comme agent, extension de la police pour surveiller les autres personnes dans la société et nous dénoncer de cette façon là. Donc on voit que quand on est vues comme des victimes, c’est quelque chose que la population est prête à faire, qu’elle ferait pas ça si la police dirait « bon nous on veut juste arrêter des travailleuses du sexe, on aime pas les travailleuses du sexe », eh bien on arriverait pas à avoir cette mobilisation là, mais quand on dit aux gens que c’est une question de nous sauver, c’est une question de mettre fin à l’exploitation, et bien, le… le… l’employé moyen d’un hôtel va même se sentir bien d’appeler la police sur nous, donc c’est ce qu’on voit dans les dernières années, là dans les relations qui a cette augmentation là… de ce type de surveillance qui est vécu vraiment de façon très violente là, par les personnes concernées.
Q3 : Quelles sont les conséquences concrètes sur les personnes qui pratiquent le travail du sexe? Peux-tu nous donner des exemples? Sandra : Eh oui, absolument, les conséquences de la criminalisation et du harcèlement policier sont à toute les sphères de l’industrie donc on peut penser par exemple aux femmes qui travaillent sur la rue. Donc évidemment y’a beaucoup beaucoup de répression, y’a des policiers qui vont être en contact avec nous presque tous les jours quand on travaille sur la rue, eh qui vont vouloir eh… menacer d’arrêter nos clients, ça veut dire qu’on doit toujours prendre des mesures de sécurité, donc tout ce qu’on peut faire pour améliorer notre sécurité peut aussi nous rendre plus visibles, peut nous rendre plus à risque de contacts avec la police, souvent on va se trouver à prendre des risques qu’on voudrait pas prendre, donc par exemple, plutôt que de passer plusieurs minutes à parler avec un client dans sa voiture, d’analyser la situation, où est-ce qu’on s’en va, c’est quoi les prix, c’est quoi les services, et bien on va sauter dans la voiture tout de suite et évidemment la dynamique de pouvoir va changer grandement et ça… ça crée donc des conditions où un agresseur va trouver des opportunités de nous cibler, aussi on pense par exemple à des femmes qui travaillent de façon indépendante et qui annoncent en ligne, et bien c’est sûr que le client ne sait pas si il parle avec un policier, la travailleuse du sexe ne sait pas si elle parle avec un policier, donc tout le monde doit faire attention, humm… et ça implique parfois de ne pas parler en détail des services qu’on offre, de ne pas eh… être capables de bien négocier, de pas être capables de faire une évaluation du client eh… souvent les travailleuses du sexe aimerait demander des pièces d’identité mais on sait que ca sera jamais possible dans un contexte où le client peut se faire arrêter, va pas vouloir donner des pièces d’identités, donc ça fait que c’est… ces répercussion là, donc dans toutes les sphères du travail que tout ce qu’on fait, que le chauffeur il est criminalisé si on demande de l’aide… si on demande à une amie de nous emmener au travail, elle elle commet un crime de proxénétisme également donc, ça fait en sorte qu’on est toujours en train d’avoir peur de la police et de se protéger d’eux. Y’a également beaucoup de descentes de polices qui vont se passer dans les endroits de travail du sexe, c’est souvent les policiers qui vont venir soit dans un bar de danseuses, ou un salon de massage où y’a peut-être cinq-six-sept femmes qui travaillent et on va voir vingt, trente, parfois même cinquante policiers arriver tous ensemble, pour eux c’est comme une expédition… une petite activité sociale, et puis il vont évidemment, déporter toute personne qui a pas sa résidence permanente, eh… ils vont évidemment fouiller tout le monde, arrêter beaucoup de personnes si elles vendent des drogues ou autre chose et puis au niveau psychologique évidemment c’est quelque chose qui est très très lourd à porter quand on se promène dans la société toujours là, avec la peur de la police, pis on sait que le système carcéral aussi y s’étend beaucoup plus que juste les agents de la police, y’a aussi les agents de la DPJ, la protection de la jeunesse qui vont être très hostiles avec les travailleuses du sexe, donc on doit toujours si on a des enfants avoir peur de l’intervention de l’État de cette façon là, on peut pas déclarer nos impôts sans avoir peur de commettre un crime en fait et que soit l’agence du revenu ou la police viennent vers nous, on peut pas aller à la banque sans avoir peur que notre argent soit saisie et dénoncée à l’État, et donc on se retrouve vraiment dans une situation de surveillance constante qui eh… outre les arrestations, les déportations, les détentions, y’a aussi un autre élément de lorsqu’on est criminalisée qui est tout le temps, toute notre vie peut importe qu’est-ce qu’on fait, qui nous atteint tout le temps et je pense que c’est une des choses les pires, un des pires effets de la criminalisation qui souvent est pas visible dans les statistiques, où dans… on a pas une histoire à raconter spécifique à ça, c’est une accumulation de vivre sous la criminalisation qui est très lourde.
Q4 : Il y a des risques de criminalisation pour vos proches également, est-ce que tu pourrais nous en parler un peu? Sandra : Oui, absolument, depuis 2014, ce que la loi dit c’est que toute personne qui aide une travailleuse du sexe à travailler commet l’offense de proxénétisme, donc y’a aucune nécessité de prouver que y’avait une exploitation, que y’avait une coercition, une violence et la personne a même pas besoin de se faire payer pour ses services, donc on parle vraiment si deux travailleuses du sexe travaillent ensemble et se réfèrent un client par exemple, et bien elles viennent de commettre l’offense de proxénétisme, les réceptionnistes, les chauffeurs, les collègues de travail, même si on demande a un membre de la famille de nous emmener voir un client, si on utilise quelqu’un comme aide pour mettre nos annonces en ligne, et bien toute façon d’aider une travailleuse du sexe c’est du proxénétisme. Et y’a une autre loi également qui parle du bénéfice matériel, donc l’argent en fait qu’on fait est un fruit de la criminalité et toute personne qui partage cet argent là est aussi eh… quelqu’un qui commet un crime, donc on va parler notamment de… si on paye quelqu’un pour nous aider, on paye euh… un ami pour être notre gardien de sécurité, et bien cette personne là aussi et bien aussi c’est un crime qu’elle commet, euh… et puis notre argent si on le met à la banque, il peut être saisi aussi, et puis ça va vraiment impliquer au niveau criminel toute les personnes autour de nous, y’a quelques exceptions dans la loi donc on parle de nos enfants ne peuvent pas être arrêtés si on paye… si on les nourrit avec notre argent de travail du sexe, mais même les exceptions ont ensuite des exceptions aux exceptions, qui font en sorte que la majorité des exceptions ne s’appliquent même pas dans la plupart des cas, et puis l’objectif derrière ces lois là, c’est vraiment entièrement d’éradiquer le travail du sexe, donc le gouvernement était très très clair lors du passage de ces lois là, que c’est pas un objectif de nous protéger, de nous donner de meilleures conditions de travail, ou d’améliorer nos vie, c’est vraiment de nous éradiquer entièrement et puis donc la loi elle est écrite dans ce sens là, de rendre impossible le fait de travailler dans l’industrie du sexe. Évidemment dans les faits, les travailleuses du sexe continuent de travailler, cette loi là va pas nous empêcher, on a encore des factures [rires], y’a personne qui paye notre loyer avec cette criminalisation là, donc c’est sûr que tout le monde continue de travailler, mais dans des conditions qui sont beaucoup pires et plus dangereuses aussi.
[BREAK MUSICAL]
Q5 : Comment la COVID a transformé la surveillance policière des travailleurs et travailleuses du sexe, particulièrement dans le travail de rue? Sandra : Donc la COVID est arrivée avec tout de suite évidemment les grands pouvoirs de santé publique, surtout au Québec y’a eu une vague très répressive au début du COVID ce qui est très dommage parce que dans le milieu VIH, qui est l’autre pandémie depuis 40 ans, y’a beaucoup beaucoup de connaissances qui ont été développées au fil des années qui prouvent que la répression n’est pas un outil de santé publique utile, c’est quelque chose qu’on sait très bien, mais la santé publique a tout de suite s’est pliée en fait à l’attitude répressive du gouvernement du Québec et puis donc on a vu les contraventions qui ont commencé assez tôt, euh… et puis évidemment lorsqu’un policier a un pouvoir supplémentaire qui lui est donné, toujours, dans toutes les situations, c’est les personnes marginalisées qui vont être ciblées d’abord et avant tout. Et puis c’est ce qu’on a vu c’est que les personnes en situation d’itinérance, les personnes visibles dans l’espace public comme les travailleuses du sexe ont tout de suite vécu la répression et cette répression là elle vient de deux façons, donc on parle de avoir une contravention oui, qui… parfois y’en a beaucoup qui sont données, parfois y’en a moins aussi qui sont données, mais c’est le fait que le policier a maintenant ce pouvoir-là, donc, le fait qu’il peut donner une contravention veut dire qu’il peut demander des pièces d’identité, qui peut rentrer dans l’espace des gens et intervenir de cette façon et puis donc ca ajoute une couche de harcèlement supplémentaire et de menace, c’est ce qu’on a vu beaucoup là, les policiers à Montréal on le sait, sur la rue, y vont pas arrêter tout le monde tout les jours, y vont pas donner des contraventions à tout le monde tout les jours, mais y vont être très menaçant et harcelant donc on a eu beaucoup de femmes qui ont rapporté des policiers qui… qui les menaçaient de… j’vais donner une contraventions qui étaient très intimidants, très violents avec elles de façon constante et ça les forçaient là à trouver des… en plus d’être dans une pandémie de manquer d’argent, de devoir aussi fuir la police beaucoup plus, et ce qu’on a vu aussi c’est assez rapidement à Montréal que y’a eu des numéro de téléphone de dénonciation qui ont été mis en ligne pour dénoncer là, nos voisins qui respectent pas les règles de COVID et évidemment très très rapidement… les personnes qui aiment pas les travailleuses du sexe qui ont une travailleuse du sexe dans leur quartier sur leur rue on commencé à appeler la police, on a eu beaucoup d’échos là, beaucoup d’appels de la population à la police pour dénoncer les travailleuses du sexe, donc on sait que quand y’a une communauté qui est vue comme indésirable, dès que y’a un pouvoir supplémentaire qui est donné à la police où à la société, et bien les gens vont s’accaparer ce pouvoir là pis essayer de l’utiliser contre nous également. Je sais que parfois y’a des personnes que « Okay, oui », okay, on pense à des personnes qui ne sont pas marginalisées et qui ne respectent pas les règles COVID pour quelque raison absurde, et que ca peut faire du bien de dire « ah ben tant mieux pour eux s’ils ont une contravention », mais dans les faits, ces gens là vont toujours être la minorité de ceux qui souffrent de cette répression là, puis c’est les personnes marginalisées là, qui eh… qui portent le poids de ça. Donc nous, chez Stella, avec nos collègues de plusieurs autres organismes du milieu de l’itinérance, du milieu eh… du VIH et de la réduction des méfaits, dès le début de la pandémie, une des premières actions était de nous créer un comité pour demander l’amnistie des contraventions, pour essayer à faire des revendications là-dessus, on est encore en train de travailler là-dessus jusqu’à maintenant malheureusement, mais c’était un des impacts premier dès que la COVID est arrivée, que la répression et on le voit jusqu’à maintenant avec le passeport vaccinal qui devient aussi une excuse pour les policiers pour rentrer dans des endroits et maintenant qui, comme y peuvent demander les pièces d’identités pour voir le passeport vaccinal ça leur permet de ne pas avoir une raison valable pour interpeller quelqu’un mais de le faire quand même et que c’est maintenant justifié, donc les pouvoirs policiers on le voit s’accumulent comme ça de toutes sortes de façons contre l’industrie du sexe, un policier du SPVM peut jouer sur le fait que parfois y fait une enquête criminelle, parfois y’a un inspecteur de la ville, parfois il est en train de faire les règles de santé publique, donc tout ces pouvoirs là qui s’accumulent ça fait qu’on a aucun droit face à… un policier qui a envie de nous interpeller.
Q6 : Pourquoi la police s’attaque aussi fort à des crimes qui sont essentiellement sans victime? Sandra : C’est sur que c’est l’objectif même de l’invention de la police dans notre société et du code criminel également, donc les policiers font ce qui se font dire par les lois qui sont essentiellement passées par nos élus, et donc on sait que le gouvernement fédéral à travers le code criminel a mis beaucoup d’énergie sur le fait de criminaliser toutes sortes de choses qui ne devraient aucunement être criminalisées, comme on parle des drogues notamment le travail du sexe, la pauvreté en général également qui est criminalisée de toutes sortes de façons, et puis donc c’est leur mandat, c’est ce qui doivent faire. Et puis je pense aussi qu’on est des cibles faciles et que pour les policiers et on les voit parfois dans des tables de concertation des tables de quartier, où ils sont très très fiers de pouvoir venir dire au résident du quartier, « eh bien on est en train de vous débarrasser de ces personnes-là, regardez combien de contraventions on a données à des personnes itinérantes », c’est quelque chose qui vont s’en vanter et être très très fiers et penser qui sont en train de contribuer à quelque chose de bien dans la société, et évidemment pour ce qui est du travail du sexe, le fait qu’on est passé… à nous définir comme victime en plus de criminelles et bien ca fait que pour eux c’est plus vu comme un crime sans victime, mais c’est vu comme si on est des femmes exploitées qui ont besoin d’être sauvées, donc ca les motivent également à… à nous cibler davantage, donc pour nous c’est clair que ce qu’on a besoin c’est un changement oui au niveau de la culture de la police, beaucoup moins de policiers aussi, parce qu’on sait qu’on a beaucoup trop de policiers et qu’ils ont rien à faire en fait et que c’est comme ca qu’ils vont nous cibler et ils doivent payer aussi pour leur existence, donc les contraventions font partie de cette méthode là de payer pour leur travail, ils sont aussi dans un système capitaliste, hum, mais il faut d’abord et avant tout changer les lois, donc on a besoin de décriminaliser, on a besoin de vraiment retirer beaucoup beaucoup de choses du code criminel pour retirer ce mandat-là, parce que tant que les policiers ont comme mandat d’éradiquer toutes les drogues, d’éradiquer tout le travail du sexe, et bien c’est sûr qui vont continuer de nous cibler peu importe qu’est-ce qu’on fait au niveau des pratiques policières.
Q7 : Pourquoi le travail du sexe n’est pas défendu par les milieux de gauche comme les autres formes de travail? Sandra : Euh, je pense que le travail du sexe c’est quelque chose qui génère des réactions très émotionnelles de plusieurs personnes, c’est quelque chose aussi qui est mal compris, et puis on a tellement l’habitude dans notre société de penser aux travailleuses du sexe comme presque humm… comme un concept théorique en fait, comme si on est pas des vraies personnes ou un peu comme une mythologie de travail du sexe, et c’est très difficile pour nous d’être visibles publiquement, ça fait souvent que y’a beaucoup de conversations sur nous qui nous incluent pas du tout, et donc y’a évidemment une alliance très très proche entre l’extrême droite souvent religieuse conservatrice et certains groupes féministes qui se disent de gauche et qui sont impliqués aussi dans d’autres questions de gauche, mais qui ont une haine profonde des travailleuses et des femmes trans et donc on voit souvent un mélange de ces discours-là qui sont difficiles à défaire et je pense aussi que pour beaucoup de personnes qui sont dans des luttes anticapitalistes que à première vue penser au travail du sexe et bien c’est vu comme une version extrême du capitalisme, on est rendu en train de vendre des services sexuels qui ne devraient jamais être marchandisés et tout ça, et que pour beaucoup de personnes y’a quelque chose de très théoriquement problématique avec ça, mais de notre côté les travailleuses du sexe, évidemment on est un mouvement de travailleuses donc, le mouvement moderne des travailleuses du sexe s’est développé beaucoup avec les mouvements syndicaux dans les années 1960s-1970s et c’est de là qu’on vient, c’est notre vision et je pense aussi que pour beaucoup de femmes dans l’industrie du sexe, la pratique du travail du sexe est une façon de lutter contre le capitalisme, on sait que beaucoup de travailleuses du sexe on fait du travail du sexe parce qu’on est dans une situation de pauvreté parce qu’on rejette aussi souvent eh… des emplois plus formels et qu’on préfère être dans des économies informelles à côté de ce système-là et puis souvent à la fin, ce qu’on fait à la fin en tant que femmes pauvres, c’est sortir de notre classe sociale de pouvoir aller avoir accès à des personnes riches, à l’argent des personnes riches et à le ramener dans nos communautés et pour beaucoup de personnes, le travail du sexe c’est une pratique anticapitaliste pour beaucoup d’autres c’est une pratique de survie dans le monde capitaliste mais c’est très dommage pour nous de voir souvent ce manque de solidarité là et que nos collègues de la gauche sont souvent réticents à nous supporter. Puis évidemment dans les dernières années avec cette montée là du discours d’exploitation qui va emprunter beaucoup à des luttes anticapitalistes hein, on est toutes contre l’exploitation du travail quand on lutte dans ces milieux là, donc y vont emprunter de ce langage là, donc c’est sûr que ça porte beaucoup à confusion je pense, pour beaucoup de personnes. Mais à la fin si on regarde par exemple un organisme comme Stella depuis les tout débuts, où est-ce qu’on est impliquées, on est impliquées dans la justice pour les personnes migrantes, on est impliquées contre la police, on est un des groupes fondateurs de la coalition pour définancer la police ici à Montréal, on est impliquées dans toutes les luttes qui devraient être en solidarité avec nous mais souvent cette solidarité-là elle est pas retournée.
Q8 : Des gens pensent que c'est une fabulation de parler de l'abolition de la police et des prisons, qu'en penses-tu? Sandra : Ah, ben c’est pas une joke pour nous [rires], c’est très sérieux, il faut abolir les polices et les prisons parce que ça l’a aucune utilité dans notre société. Quand on a des personnes qui ont pas assez de nourriture à manger, qu’on a des personnes qui vivent toutes sortes de misères énormes on a pas les moyens en tant que société de payer tout cet argent-là pour la police, de construire des prisons, d’incarcérer les personnes, c’est tellement une atteinte profonde à la dignité humaine, à tout ce qu’on devrait vouloir comme société, puis oui, y’aura toujours des personnes qui commettent des actes de violence, y’a d’autres façon de gérer cette violence là, pis on le voit à chaque fois que la répression et la punition ne fonctionne pas, ces agresseurs-là que tout le monde est content de voir enfermés en prison et bien c’est nous dans nos communauté qui les recevons quand ils sortent de prison et qu’ils sont encore plus violent et qui sont encore plus eh… endommagés psychologiquement, euh… on va pas régler ces problèmes là à travers la prison, on va régler ces problèmes là à travers d’autre chose, incluant de la compassion, incluant, de se donner les conditions physiques, matérielles, financières pour être capables de vivre et de ne pas s’exposer à ces violences là, donc pour nous c’est… c’est très sérieux ce combat là, on sait que dans les prisons provinciales environ 80% des femmes qui sont incarcérées ont une expérience de travail du sexe, et ce qu’on sait aussi pour nous, c’est que tant au niveau des femmes autochtones assassinées et disparues qu’au niveau des autres femmes qui vivent de la violence que les mêmes femmes qui sont le plus à risque de violence, sont les femmes qui sont le plus à risque d’incarcération et de contacts avec la police, donc si on veut mettre fin à la violence envers les femmes, y faut mettre fin à la police qui est la source de violence et de conditions qui facilitent la violence.
Conclusion
Depuis des années, des travailleuses du sexe s'organisent et se battent pour améliorer leurs conditions de travail et les rendre plus sécuritaires. Or, la police et les politiciens s'acharnent sans répis à tenter de les enfermer, voire de les éradiquer en créant de nouvelles lois et en les appliquant brutalement. Ces lois ont des conséquences immondes sur la vie et les corps des travailleuses du sexe qui sont continuellement surveillées et harcelées. En situation pandémique ou non, lutter au front et en solidarité avec les travailleuses du sexe, c'est s'assurer que des personnes particulièrement vulnérables ne soient pas en danger continuel. Ne pas dénoncer, c'est la base, mais il faut aller plus loin : il faut abolir la police et les prisons.
C'est tout pour ce premier épisode de la deuxième saison du Verger au complet! Merci à Sandra d'avoir accepté notre invitation. Notre prochain épisode portera sur le féminisme anticarcéral.
Translation
The Whole Orchard : episode 1 - season 2 : Police Repression Against Sex Workers
Music :
A special thanks to all the bands that accepted to share their music for the making of the episode :
- Devon Michigan, November 8th, from the album with the same name : https://devonmichigan.bandcamp.com/
- Les ogres de Barback, Rue de Panam, from the album La rue du temps : https://lesogres.com/
- Claude L'Anthrope, Les lumières ont tué la nuit, from the album with the same name : https://claudelanthrope.bandcamp.com/
Additionnal ressources
Stella's website : https://chezstella.org/publications/
Introduction for season 2
In our surveillance societies, where our every move is spied on, controlled, calculated and recorded in huge databases, reflecting on the colonial, capitalist and oppressive role of the police and prisons is more than ever necessary.
When new videos of police interventions are scandalized by their racist violence, the leaders, the police and the politicians talk about bad apples. But if we look at the basic trend, these blunders have been repeated for decades. Police misconduct is systematic; police violence is systemic. Despite this, the police lobby manages to avoid questioning it by pointing to street gangs, the proliferation of guns or other scarecrows to justify constant budget increases.
While the climate crisis is looming, while migrant prisons are being built and filled, while systemic racism continues unchecked and the people who pay the price are always the same, the money keeps flowing to police forces and prison institutions. Millions of dollars are spent to keep the police armed and the prisons crowded. But as frightening and pervasive as these institutions are, they can be destroyed; historically, many communities have lived without police and prisons!
The history of police and prisons on Turtle Island is well documented. It is a horrific tale of settlers setting up institutions to suppress any form of protest to the capitalist and colonial order. It was the police and prisons that allowed the white bourgeoisie to implement racist development in territory that had never been ceded to them. The various indigenous communities were the first to suffer from these institutions, and are still to this day vastly over-represented among the victims of the police and in the prisons.
In this second season of the Whole Orchard, the menu offers more specific lines of thought than the first season's episodes. Still in the form of interviews with people as passionate as they are passionate, we will discuss the impacts of these institutions on sex workers, policing in Aboriginal communities, anti-custodial feminism, the militarization of police, transformative justice and prisons for migrants.
It is time to end the hypocritical and misleading liberal view that all police vices are the fruit of a few bad apples. From the roots to the buds, police departments at all levels are all bad apples in a horrible orchard of rot. Let's take on the whole orchard!
Introduction for episode 1
As we know, the police do not discriminate and oppress all social groups equally. We rarely see them in Westmount, while we know very well that the billions embezzled in tax havens do not come from Montreal-North! The police are constantly doing social and racial profiling and it is often the groups that are less represented in the public space that suffer from surveillance, harassment, violence and police discrimination. By singling out these groups in particular, police officers use their authority to advance their far-right, patriarchal and sanctimonious political lines. For example, sex workers are particularly targeted by the police and therefore overrepresented in prisons. In addition, people who engage in sex work have been particularly affected by the measures put in place by politicians during the pandemic.
In Montreal, Stella, an organization by and for sex workers that has been in existence for over 25 years, works to defend the rights of sex workers. In this first episode of the second season of The Complete Orchard, we talk to Sandra Wesley, Stella's Executive Director and long-time sex worker advocate.
Q1: First question, to get a better sense of where we are, how would you define sex work?
Sandra : So sex work is a category that includes a lot of things, it's a political term in fact that we gave ourselves as a community to all join in a struggle together so it's any work where we exchange sexual services for money or for something else too, sometimes in informal economies we can talk about exchanging for drugs, sometimes in informal economies we can talk about exchanging for drugs, exchanging for a place to sleep or whatever, and so it includes many spheres, it includes people who work in pornography, it includes people in strip bars, massage parlors, escorts, people who work on the street, so people who work in in very very very formal places, in very informal places, independently, who also work for other people, so it includes a whole... a category of people, and in the end what we have in common is that we exchange sexual services for something, generally money, and that for us it is obviously a job, so it is an economic activity, it is not an inherent exploitation that we undergo, even if the job is an inherent exploitation, but not more specific, so it is really something that we do to pay our bills generally.
Q2: What are the typical relationships between police and sex workers?
Sandra : Eh, so it's for sure that the relationship is very negative between the police and sex workers, so we know that we have whole units at the SPVM dedicated to finding sex workers and harassing us in all sorts of ways often under the umbrella of morality, no matter how the laws change, the SPVM still has this attitude there that we are immoral and we need to be eh... to be eh... to be monitored, to be controlled... and since 2014 sex work is fully criminalized in Canada, uh... and this new criminalization there it also comes with a change of attitude towards us, we went from criminals to victims of exploitation, even if we commit crimes, it's not very logical, but it's the... the vision of the current government, so the police now have a mandate to save us in addition to... to criminalize us and that makes them even more aggressive, even more violent, even more creative in the ways to dehumanize us. An example with the SPVM recently is the operation Radar, so it's an operation of the SPVM where they asked all the employees of the hotels and cabs of the tourism industry to know how to spot a sex worker, really on the basis of profiling there... completely absurd and to denounce us to the police, under the guise that we're surely all exploited and that it would be a way to save us that we're probably all minors, etc. So the police are mobilizing the average citizen as an agent, an extension of the police to monitor other people in society and denounce us in this way. So we see that when we are seen as victims, this is something that the population is ready to do, that they wouldn't do that if the police said "well we just want to arrest sex workers, we don't like sex workers", well we wouldn't be able to get that mobilization, but when we tell people that it's a question of saving us, it's a question of putting an end to exploitation, well, the... the... the average hotel employee is even going to feel good about calling the police on us, so that's what we're seeing in the last few years, there in the relationships that has this increase there... of this type of surveillance that is really lived in a very violent way there, by the people involved.
Q3: What are the concrete consequences on people who practice sex work? Can you give us some examples?
Sandra : Yes, absolutely, the consequences of criminalization and police harassment are in all spheres of the industry, so we can think for example of women who work on the street. So obviously there is a lot of repression, there are police officers who will be in contact with us almost every day when we work on the street, eh who will want to eh... threaten to arrest our clients, that means we always have to take security measures, so anything we can do to improve our security can also make us more visible, can make us more at risk of contact with the police, often we'll find ourselves taking risks that we wouldn't want to take, so for example, instead of spending several minutes talking to a customer in his car, analyzing the situation, where are we going, what are the prices, what are the services, well we will jump in the car right away and obviously the power dynamics will change greatly and that... so it creates conditions where an abuser is going to find opportunities to target us, also we think for example about women who work independently and advertise online, well of course the client doesn't know if they're talking to a police officer, the sex worker doesn't know if they're talking to a police officer, so everyone has to be careful, umm... and that sometimes means not talking in detail about the services you offer, not being able to eh... negotiate well, not being able to do an assessment of the client eh... often sex workers would like to ask for identification but we know that this will never be possible in a context where the client can be arrested, will not want to give identification, so it is... these repercussions, so in all spheres of work that everything we do, that the driver is criminalized if we ask for help... if we ask a friend to take us to work, she commits a crime of pimping as well, so that makes us always afraid of the police and protect ourselves from them. There are also a lot of police raids that take place in sex work places, it's often the police who will come to either a bar of dancers, or a massage parlor where there are maybe five-six-seven women working and we'll see twenty, thirty, sometimes even fifty police officers arrive all together, for them it's like an expedition... a little social activity, and then they'll obviously, deport anyone who doesn't have a permanent residence, eh... they'll obviously search everyone, arrest a lot of people if they're selling drugs or something else and then at the psychological level obviously it's something that's very, very heavy to bear when you're walking around in society always there, with the fear of the police, and we know that the prison system also extends much further than just the police officers, there are also the DPJ officers, the youth protection officers who are going to be very hostile with the sex workers so we always have to be afraid of the intervention of the state if we have children, we can't declare our taxes without being afraid of committing a crime and that either the revenue agency or the police will come to us, we can't go to the bank without being afraid that our money will be seized and denounced to the state, and so we really find ourselves in a situation of constant surveillance that eh... in addition to arrests, deportations, detentions, there is also another element of when we are criminalized that is all the time, all our lives no matter what we do, that affects us all the time and I think that is one of the worst things, one of the worst effects of criminalization that often is not visible in the statistics, where in... we don't have a story to tell specific to that, it is an accumulation of living under criminalization that is very heavy.
Q4: There are risks of criminalization for your loved ones as well, could you tell us a little bit about that?
Sandra : Yes, absolutely, since 2014, what the law says is that anyone who helps a sex worker to work commits the offense of pimping, so there is no need to prove that there was exploitation, that there was coercion, violence and the person doesn't even need to get paid for their services, so we're really talking about if two sex workers work together and refer a client for example, well they have just committed the offense of pimping, receptionists, drivers, co-workers, even if we ask a family member to take us to a client, if we use someone as an assistant to put our ads online, well any way to help a sex worker is pimping. And there's another law as well that talks about material benefit, so the money actually that we make is a fruit of crime and anyone who shares that money is also eh... someone who commits a crime, so we're going to talk about... if we pay someone to help us, we pay uh... a friend to be our security guard, well this person also and well also it is a crime that he commits, uh... and then our money if we put it in the bank, it can be seized too, and then it will really involve at the criminal level all the people around us, there are some exceptions in the law so we talk about our children can not be arrested if we pay... if we feed them with our sex work money, but even the exceptions then have exceptions to the exceptions, so that the majority of the exceptions don't even apply in most cases, and then the goal behind these laws there, it's really entirely to eradicate sex work, So the government was very clear when it passed these laws, that it's not an objective to protect us, to give us better working conditions, or to improve our lives, it's really to eradicate us entirely and so the law is written in this sense, to make it impossible to work in the sex industry. Obviously, in reality, sex workers continue to work, this law will not prevent us, we still have bills [laughs], there is nobody who pays our rent with this criminalization, so it is certain that everyone continues to work, but in conditions that are much worse and more dangerous too.
[Musical break]
Q5: How has COVID transformed police surveillance of sex workers, particularly in street work?
Sandra : So COVID came in with the big public health powers right away, especially in Quebec there was a very repressive wave at the beginning of COVID which is very unfortunate because in the HIV community, which is the other pandemic for the last 40 years, There is a lot of knowledge that has been developed over the years that proves that repression is not a useful public health tool, this is something that we know very well, but public health immediately gave in to the repressive attitude of the Quebec government and then we saw the tickets that started quite early, um... and then obviously when a police officer has an additional power that is given to him, always, in all situations, it is the marginalized people who will be targeted first and foremost. And this is what we have seen: people in a homeless situation, people who are visible in the public space, such as sex workers, have immediately experienced repression, and this repression comes in two ways, so we are talking about getting a ticket, yes, which... sometimes there are many of them, sometimes there are fewer given, but it's the fact that the police officer now has this power, so the fact that he can give a ticket means that he can ask for identification, that he can enter people's space and intervene in this way, and so it adds an extra layer of harassment and threat, that's what we've seen a lot of, the police in Montreal we know, on the street, they're not going to arrest everybody every day, they're not going to give tickets to everybody every day, but they're going to be very threatening and harassing so we've had a lot of women who have reported police officers who... threatening them with... I'm going to give a ticket, they were very intimidating, very violent with them constantly and that forced them to find... in addition to being in a pandemic of not having enough money, of having to flee from the police a lot more, and what we also saw was that quite quickly in Montreal there were denunciation phone numbers that were put on line to denounce our neighbors who don't respect the rules of COVID and obviously very quickly... people who don't like sex workers who have a sex worker in their neighbourhood on their street started to call the police, we had a lot of feedback, a lot of calls from the population to the police to denounce sex workers, so we know that when a community is seen as undesirable, as soon as there is an additional power that is given to the police or to society, people will take this power and try to use it against us too. I know that sometimes there are people that "Okay, yes", okay, we're thinking of people who are not marginalized and who don't respect the COVID rules for some absurd reason, and that it may feel good to say "oh well, good for them if they get a ticket", but in fact, these people will always be the minority of those who suffer from this repression, and it's the marginalized people who, eh... who bear the brunt of it. So we at Stella, along with our colleagues from several other organizations in the homelessness community, the HIV community and the harm reduction community, are the ones who are bearing the brunt of this. of HIV and harm reduction, from the beginning of the pandemic, one of the first actions was to create a committee to ask for an amnesty of tickets, to try to make demands on this, we are still working on it until now unfortunately, but it was one of the first impacts as soon as the COVID arrived, that the repression and we see it until now with the vaccine passport which becomes also an excuse for the police officers to enter places and now that, since they can ask for identification to see the vaccination passport, this allows them to not have a valid reason to arrest someone but to do it anyway and that it is now justified, so the police powers we see are accumulating in all sorts of ways against the sex industry a police officer of the SPVM can play on the fact that sometimes he is doing a criminal investigation, sometimes there is a city inspector, sometimes he is making the rules of public health, so all these powers that accumulate make that we have no right against... a police officer who wants to question us.
Q6: Why do the police go after crimes that are essentially victimless so hard?
Sandra : It's the very purpose of the invention of the police in our society and the criminal code as well, so the police do what they are told by the laws that are essentially passed by our elected officials, and so we know that the federal government through the criminal code has put a lot of energy into criminalizing all sorts of things that should not be criminalized at all, like we're talking about drugs including sex work, poverty in general as well which is criminalized in all sorts of ways, and so that's their mandate, that's what they have to do. And I also think that we are easy targets and that for the police officers, and we sometimes see them at neighbourhood tables, where they are very, very proud to be able to come and say to the resident of the neighbourhood, "Well, we are getting rid of these people, look at how many tickets we gave to homeless people", it's something that they're going to brag about and be very very proud of and think that they are contributing to something good in society, and of course in terms of sex work, the fact that we have gone to defining us as victims as well as criminals and well that makes it so that for them it's no longer seen as a victimless crime, but it's seen as if we are exploited women who need to be saved, so that also motivates them to... to target us more, so for us it's clear that what we need is a change yes in the culture of the police, a lot less police as well, because we know that we have way too many police and they have nothing to do in fact and that's how they're going to target us and they have to pay for their existence as well, so the tickets are part of that method of paying for their work, they're also in a capitalist system We need to decriminalize, we need to remove a lot of things from the criminal code to remove this mandate, because as long as the police have a mandate to eradicate all drugs, to eradicate all sex work, they will continue to target us no matter what we do in terms of police practices.
Q7: Why isn't sex work defended by left-wing circles like other forms of work?
Sandra : Uh, I think that sex work is something that generates very emotional reactions from many people, it's also something that is misunderstood, and then we're so used to in our society to thinking of sex workers as almost umm... as a theoretical concept in fact, as if we're not real people or a bit of a mythology of sex work, and it's very difficult for us to be visible publicly, so there's often a lot of conversations about us that don't include us at all, and so there's obviously a very very close alliance between the extreme right often religious conservative and some feminist groups that call themselves leftists and are involved in other leftist issues as well, but who have a deep hatred of trans women and trans workers and so we often see a mixture of these discourses which are difficult to undo and I think also that for many people who are in anti-capitalist struggles that at first sight to think about sex work is seen as an extreme version of capitalism, we're selling sexual services that should never be commodified and all that, and that for a lot of people there's something very theoretically problematic with that, but for us as sex workers, obviously we're a workers' movement so, the modern sex workers' movement developed a lot with the labor movements in the 1960s-1970s and that's where we come from, that's our vision and I also think that for a lot of women in the sex industry, sex work is a way to fight against capitalism, we know that a lot of sex workers are in sex work because we are in a situation of poverty because we also often reject eh We know that many sex workers are involved in sex work because we are in a situation of poverty, because we often reject more formal jobs and prefer to be in informal economies alongside this system, and then often in the end, what we do as poor women is to get out of our social class to be able to have access to rich people, to rich people's money and to bring it back to our communities and for many people, For many people, sex work is an anti-capitalist practice, for many others it is a survival practice in the capitalist world, but it is a shame for us to see this lack of solidarity and that our colleagues on the left are often reluctant to support us. Then obviously in the last years with this rise of the discourse of exploitation which will borrow a lot from anti-capitalist struggles, we are all against the exploitation of work when we struggle in these circles, so they will borrow from this language, so it is sure that it is confusing I think, for many people. But in the end, if we look at an organization like Stella, for example, since the very beginning, where we are involved, we are involved in justice for migrants, we are involved against the police, we are one of the founding groups of the coalition to define the police here in Montreal, we are involved in all the struggles that should be in solidarity with us but often this solidarity is not returned.
Q8: Some people think it's a joke to talk about abolishing the police and prisons, what do you think?
Sandra : Ah, well it's not a joke for us [laughs], it's very serious, we have to abolish the police and the prisons because they have no use in our society. When we have people who don't have enough food to eat, when we have people who live in all kinds of enormous misery, we can't afford as a society to pay all that money for the police, to build prisons, to incarcerate people, it's such a profound attack on human dignity, on everything we should want as a society, and yes, there will always be people who commit acts of violence, there are other ways of managing this violence, and we see it every time that repression and punishment don't work, these aggressors that everyone is happy to see locked up in prison, well it's us in our communities who receive them when they get out of prison and they are even more violent and even more eh... psychologically damaged, uh... we are not going to solve these problems through prison, we are going to solve these problems through other things, including compassion, including giving them the physical, material and financial conditions to be able to live and not expose themselves to this violence, so for us it is... We know that in the provincial prisons, about 80% of the women who are incarcerated have experience in sex work, and what we also know is that, as much for the murdered and missing Aboriginal women as for the other women who live with violence, the same women who are most at risk of violence, So if we want to end violence against women, we have to end the police, who are the source of violence and the conditions that facilitate violence.
Conclusion
For years, sex workers have been organizing and fighting to improve their working conditions and make them safer. However, the police and politicians are relentless in their attempts to lock them up and even eradicate them by creating new laws and brutally enforcing them. These laws have a horrific impact on the lives and bodies of sex workers, who are continually monitored and harassed. In a pandemic situation or not, fighting on the front lines and in solidarity with sex workers is about ensuring that particularly vulnerable people are not in constant danger. Not denouncing is the basis, but we must go further: we must abolish the police and the prisons.
That's it for this first episode of the second season of The Orchard in full! Thanks to Sandra for accepting our invitation. Our next episode will focus on anticarceral feminism.